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Barroso à l'Uni de Genève : délicieuse nomination

 

Sur le vif - Jeudi 19.02.15 - 15.05h

 

Que les études européennes de l’Université de Genève fussent un terreau fertile aux partisans de l’adhésion de la Suisse à l’UE, on le savait depuis longtemps, et nous l’avons d’ailleurs évoqué ici, notamment en dénonçant des castings totalement déséquilibrés dans des débats pré-électoraux.  Mais pour ceux qui, peut-être, en auraient encore douté, le communiqué diffusé aujourd’hui, 14h, devrait dissoudre leurs incertitudes : le prochain professeur invité au Global Studies Institute (GSI) de l’UNIGE et à l’Institut des hautes études internationales et du développement (IHEID) s’appelle… José-Manuel Barroso !

 

Notre alma mater, assurément, a le droit d’engager qui elle veut. Mais disons que pour tenir un discours académique, empreint de l’indispensable dimension critique contenue dans ce mot, l’homme qui a présidé pendant dix ans (2004-2014) la Commission européenne, n’est peut-être pas le plus impartial des esprits. Conférencier, oui : c’est même très bien, à ce titre, d’avoir recours à des acteurs politique engagés. Mais professeur, même « invité », c’est tout de même confirmer avec éclat l’idéologie pro-européenne de l’Université de Genève. Car enfin, si l’on confie une chaire à l’ancien président de la Commission, pourquoi ne pas en octroyer une autre, en contrepartie, à un esprit ou un acteur combattant tout rapprochement avec l’UE ? Tiens, Blocher « professeur invité » à l’Uni de Genève, vous les voyez déjà, les réactions de haine qu’une telle nomination susciterait ?

 

Il y aurait donc deux poids, deux mesures : si on engage comme « professeur invité » un acteur politique de premier plan incarnant un certain combat pour l’Europe, c’est bien. Bénédiction, blanc-seing, feu vert. Si, au contraire, toujours dans l’idée de donner un espace de parole à une personnalité politique, on fait appel à une figure ayant incarné le camp contraire (lequel, non seulement a lieu d’être, mais rassemble de plus en plus de monde en Suisse et sur le continent), alors là, non. Tollé. Condamnations. Manifs, jusque devant les amphithéâtres. Oh le beau monde. Oh, les braves gens. Oh, la « liberté d’expression ». Oh, la belle indépendance de la parole académique. Heurtée, de plein fouet, par l’océan des préjugés. C’est exactement cela que révèle la nomination de M. Barroso comme « professeur invité » à l’Université de Genève.

 

Tiens, puisqu’il « professera », il pourrait peut-être consacrer un cours ou un séminaire à expliquer à ses étudiants comment, en 2005, il a entrepris toutes choses pour rendre caduc le vote souverain du peuple français qui, au printemps, avait dit non au Traité européen. Il avait dit non avec le cœur, mais contrairement au Cancre de Prévert, il paraît qu’il avait dit oui avec la tête. Alors, on s’est arrangé pour ignorer son vote. Et on a mis en œuvre le contraire. Vivement l’enseignement de M. Barroso à l’Université de Genève.

 

Pascal Décaillet

 

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