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  • "Sondage" : de qui se moque la TG ?

     

    Sur le vif - Mercredi 30.10.13 - 15.08h

     

    Une parodie. Une duperie du public. Tels sont les mots, les seuls qui vaillent, pour qualifier le « sondage » que nous propose aujourd’hui, avec tambours et trompettes, en une, puis sur la double page 2 et 3, la Tribune de Genève. Il y a tant et tant à dire sur cette mise en scène, cette mise en page aussi, mais ce qui provoque le plus la colère, c’est l’illusion d’objectivité scientifique derrière laquelle se camoufle le journal.

     

    Soyons clairs : la TG est un journal privé, elle est totalement libre de rouler pour qui elle veut, aucun problème. Elle peut commenter, éditorialiser, pamphlétiser tant qu’elle veut, c’est son droit. Mais se livrer, sur la base d’un échantillonnage aussi insignifiant de sondés, à cette disposition de graphiques impeccables, très attirants pour l’œil, les mêmes que pour les résultats de votations, voilà qui induit en erreur le lecteur, lui donne le sentiment d’une vérité chiffrée, alors qu’il n’en est rien. Tout cela, à J-11 de l’élection du Conseil d’Etat. Car enfin, le grand public ne fait que parcourir les journaux, son œil est retenu par la titraille et par les graphiques, il peut aisément prendre comme vérité révélée ce qui n’est que pures spéculations. Elles sont tellement plaisantes à l’œil, ces deux pages, qu’on dirait les résultats de l’élection, dans l’édition du lundi 11 novembre prochain !

     

    Comment un quotidien aussi sérieux que la TG, qui jouit à Genève d’une situation quasiment monopolistique, peut-il, sans provoquer dans sa propre rédaction un immense éclat de rire, venir nous dire que la somme des sondés est de 327 lecteurs, « et, afin que l’échantillonnage corresponde à la composition en âge et en sexe du lectorat de la Tribune, il été réduit à 213 personnes ». Que signifie cette « réduction » ? Que signifie ce charabia ? Que signifie ce taux chétif, insignifiant, de 213 personnes ?

     

    Pire : on prend ça, on le balance comme argent comptant, et on titre, sur tout la largeur : « Derrière Maudet et Longchamp, la bataille fait rage ». Et on nous catapulte un septuor d’élus, dont, comme par hasard, les cinq de l’Entente. Et on nous annonce une bataille serrée pour la septième place. Et on sonde même le public sur l’identité du futur Président, ce qui est vain puisque le choix en revient au collège. Et on peaufine et parachève l’impression que les jeux sont faits, qu’il n’est plus nécessaire d’aller voter : allez, circulez, bonnes gens, vous n’êtes plus citoyens, non, vous n’êtes plus que des sujets. Plus besoin de voter. La cléricature de la TG s’en est occupée pour vous. Saint François et Saint Pierre vous bénissent. On se retrouve dans cinq ans. Et surtout, petit peuple, d’ici là, continuez à bien nous faire rire.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Bon vent, Jean-François Fournier !

     

    Sur le vif - Lundi 28.10.13 - 12.57h4q4nta0_news624.jpg

     

    Chroniqueur depuis quinze ans au Nouvelliste, journal dont je n'ai pas dû manquer un numéro depuis que je sais lire, je tiens à dire ici à quel point j'ai apprécié d'exercer cette fonction externe, depuis plus de six ans, alors que le rédacteur en chef était Jean-François Fournier.



    Il n'a jamais - pas plus que les deux précédents d'ailleurs, MM François Dayer et Jean Bonnard - influé sur le choix de mes chroniques, ni tenté la moindre ingérence ou censure, mais nous avons toujours entretenu, épisodiquement certes mais de façon fraternelle, des relations complices d'amoureux de l'actualité: clins d’œil, messages, coups de fil, traditionnels repas d'été, sur l'Alpe, avec "le Grand", excitations communes sur l'événement. Bref, nous échangions entre journalistes, fous de leur métier. Aimant le vie, la politique au centimètre près, le terroir, ses nectars.



    J'ignore totalement les raisons de son départ. Chroniqueur indépendant, je ne me prononce jamais sur la vie interne des journaux pour lesquels je travaille. Mais, du fond du coeur, je souhaite bon vent, quelle que soit son orientation future, à cet homme de plume et de littérature, de culture, de cinéma. Un esprit libre. Bonne continuation, Jean-François !

     

    Pascal Décaillet

     

  • La politique kidnappée par les couleurs privatisées des écuries

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    Sur le vif - Dimanche 27.10.13 - 16.13h

     

    Je suis le premier à ne pas souhaiter un proportionnalisme absolu entre l'élection législative et celle de l'exécutif. Je pourrais d'ailleurs, dans un autre contexte que celui de Genève, vous réciter par coeur le Discours de Bayeux.



    Mais tout de même ! Entre une composition gouvernementale qui ne ferait que procéder du législatif, et le joyeux hasard qu'on nous propose à Genève en cet automne 2013, soit deux élections sans aucun rapport entre elles, il y a une mesure plus juste à inventer. Les Constituants ne l'ont manifestement pas fait, et le peuple a accepté un système qui ne va tout simplement pas.



    Nous avons eu, le 6 octobre, une élection parlementaire. Il y a eu des débats de types de société, et puis un beau dimanche le peuple a tranché, donnant pour près de cinq ans une nouvelle répartition des forces au Grand Conseil. Avec, notamment, cette fameuse composition tripolaire que tout le monde a notée.



    Cinq semaines plus tard (délai beaucoup trop long, je l'ai noté précédemment), nous votons - ou plutôt nous revotons - pour le Conseil d'Etat. Onze candidats, sept élus. Qui ? Je n'en sais fichtre rien, et ne suis pas loin de m'en désintéresser, tant cette élection, simple casting de personnes, m'apparaît dépourvue d'intérêt par rapport à ce qui s'est passé le 6 octobre, et qui sera véritablement la nouvelle donne, l'épine dorsale de la nouvelle législature.



    Cette élection du Conseil d'Etat, second tour, est à ce point déconnectée de l'élection parlementaire - mais vraiment, plus que jamais, à 100% cette fois - qu'on se demande bien comment vont s'organiser, autrement que par le hasard et le coup par coup, les rapports entre gouvernement et Parlement entre 2013 et 2018.



    Il y a, dans ce système, quelque chose de pernicieux. La politique, entendez les choix de société, y est largement perdante, au profit d'une arithmétique du fortuit. On irait voter comme on lancerait ses dés, ou comme on placerait ses jetons sur le tapis d'un casino. Je déteste ce système, qui tue la politique, et ne fait que renforcer les couleurs privatisées des écuries, de gauche comme de droite d'ailleurs.

     

    On ne roule plus pour des idées. On roule tellement pour des personnes, ou des grappes de personnes, avec lesquelles on se fait photographier sur les stands, qu'on se croirait au Palio de Sienne, avec ses antagonismes de couleurs, les "Contrade", à chaque clan sa griffe, son logo, ses supporters. A chaque équipe, ses tifosi. Comme si cette joute de casting était seule au monde, ne dépendait que d'elle-même, et surtout ne devait s'affirmer que par son affranchissement total de la première bataille, dûment scellée le 6 octobre, celle qui s'intéressait à la confrontation des idées et aux choix de société. Nous ne sommes pas loin du surréalisme, ou du dadaïsme. Avec beaucoup de couleurs, quelques perspectives cubistes, et l'écriture automatique - plus ou moins talentueuse - en guise de cohérence.

     

    Pascal Décaillet