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Le MCG et la splendeur des conversions

 

Sur le vif - Mercredi 04.05.11 - 12.15h

 

J’ai eu la chance, à l’âge de huit ans, de me rendre avec ma famille sur le chemin de Damas, en provenance de Beyrouth, via Baalbek. C’était en juillet 1966, il faisait abominablement chaud, l’autobus n’était pas conditionné, et partout, le nez collé à la vitre, dans la dévastatrice beauté de ce désert, je cherchais l’endroit où avait bien pu se dérouler la conversion du centurion Saul, pour devenir Saint Paul. Je ne l’ai, hélas, pas trouvé. Même lorsque le car a crevé un pneu, et que des Bédouins sont venus nous dire bonjour. 45 ans après, la magie caniculaire de ce voyage me fait penser, avec l’enivrante énigme d’un mirage, à l’actuel conseiller d’Etat radical à Genève.

 

J’ai toujours été fasciné par les conversions. Celle de Claudel, le 25 décembre 1886, debout près du 2ème pilier de Notre-Dame de Paris, figure au nombre de celles qui ont le mieux habité la littérature. Dans un registre plus laïc – et sans doute un peu plus prosaïque – la conversion du magistrat précité à la préférence cantonale dépasse, en fulgurance, la longue, l’interminable martyrologie de feu, celle des saints, celle des fous, celles des miraculés, celle des illuminés, celle des stylites qui finissent assis, extatiques, sur l’extrémité d’une colonne. Il paraît même qu’ils y prennent plaisir.

 

Mais cette conversion a une singularité : le patient la nie. Irisé, pourtant, déjà, irradié, tellement perclus de bonheur qu’il se refuse à prendre acte de la majesté du Grand Virage. Déboussolé. Plus de compas. Juste la lumière, celle qui rend aveugle. Tout s’est pourtant si bien enchaîné, précipité, en quelques jours : vendredi, dans le Temps, quelques fragments apocryphes de Saint Mark, la Bonne Nouvelle, nouveaux pôles, nouvelles frontières. Lundi, confirmation par le Conseil d’Etat de la nouvelle politique, et surtout de la nouvelle rhétorique. Ce matin, dans la Tribune de Genève, le zèle des convertis. L’Epître à Sandrine, cendre et poudre, fureur, gémonies. Nouvelles victimes, Nouvelles proies. Nouveaux repères. Retour du compas. Nouvelle géométrie, pleine d’inconnues. Aussi belles qu’une Fille de Jérusalem. Dans l’étouffante splendeur du désert.

 

Pascal Décaillet

 

 

 

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