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Petit pays, grande fermeté


Chronique publiée dans le Nouvelliste - Jeudi 30.12.10


Face à ses deux puissants voisins, une France de 60 millions d’habitants, une Allemagne qui en compte 80, la Suisse est une petite fleur fragile. Pays sans grandes richesses naturelles, hormis la qualité de ses nectars, l’éblouissante beauté de ses paysages. Pays qui doit compter sur sa matière grise, l’excellence de son système de formation, la vitalité conquérante de ses exportations. Pays qui était encore pauvre au dix-neuvième siècle, et même au début du vingtième, le Valais en sait quelque chose. Pays dont les atouts sont avant tout moraux : culture politique commune à 26 cantons très différents, fédéralisme, démocratie directe unique au monde, et que ce dernier, d’ailleurs, nous envie.

Si cette force morale qui nous réunit, au-delà de nos clivages, devait un jour flancher, alors le pays serait perdu. Non ses habitants, ni ses paysages, mais le miracle d’une cimentation qui tente, avec un rare succès en comparaison internationale, de nous tenir ensemble, disons depuis 162 ans : je n’ai jamais été très adepte des mythes ni des références du treizième siècle. Ce ciment, le « foedus », c’est l’Etat fédéral. Il n’existe qu’à travers notre volonté, peut parfaitement un jour se déliter, de même que la Suisse peut retomber dans la pauvreté qui était sienne lorsque, par exemple, la vallée du Rhône était un marécage. En politique, rien n’est jamais gagné : les humains doivent se battre, et se battre encore. Défi de chaque génération, toujours recommencé.

Le pari suisse, l’aventure suisse, ne sont pas gagnés pour l’éternité. Se reposer sur le travail des ancêtres sans apporter soi-même sa pierre à l’édifice, c’est déjà renoncer. Quand la Suisse négocie avec ses voisins, qui sont des géants par rapport à elle, quand elle discute avec l’Union européenne, elle doit le faire le regard droit, sûre de ses valeurs, de ses atouts. Certains d’entre eux, du côté des droits populaires, ne doivent en aucun cas être bradés. Les pressions exercées sur nous, par exemple dans le domaine fiscal, doivent être décodées avec réalisme, dégarnies de leur vernis mensonger de morale. Et, finalement, refusées. C’est dur, pas très sympa, pas très porteur en termes d’images, mais c’est la condition de la survie.

Pascal Décaillet

 

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