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Vieux-Grenadiers : Mettan dans la fournaise

 


Sur le vif - Et baïonnette au canon - Mardi 16.11.10 - 11.41h


 

« Et, lanciers, grenadiers aux guêtres de coutil,

Dragons que Rome eût pris pour des légionnaires,

Cuirassiers, canonniers qui traînaient des tonnerres,

Portant le noir colback ou le casque poli,

Tous, ceux de Friedland et ceux de Rivoli,

Comprenant qu'ils allaient mourir dans cette fête,

Saluèrent leur dieu, debout dans la tempête.

Leur bouche, d'un seul cri, dit : Vive l'empereur !

Puis, à pas lents, musique en tête, sans fureur,

Tranquille, souriant à la mitraille anglaise,

La garde impériale entra dans la fournaise. »


Victor Hugo – Waterloo – Les Châtiments – L’Expiation

 


Donc, les Vieux-Grenadiers ont refusé la candidature de Guy Mettan. Le plus fou, dans cette nouvelle, ça n’est pas tant le refus (tout club à ses règles), mais bel et bien que le très débonnaire et très placide président du Grand Conseil genevois ait cru bon de postuler à une instance dont le seul nom, magnifique, évoque à la fois les Soldats de l’An II, l’Empire, l’odeur de la poudre, le courage. L’Empire, oui, que ce fût pour le servir ou le combattre, Genève et la Suisse furent au centre de cette aventure, et nombre de Grenadiers genevois durent servir dans la Grande Armée.

 

Dans cette affaire, de deux choses l’une. Ou bien, les Vieux-Grenadiers incarnent encore ces valeurs-là, qui sont celles de leurs costumes et de leurs armes, de ces ombres immenses dont Victor Hugo (toujours lui) écrit qu’elles « avaient chassé vingt rois, passé les Alpes et le Rhin, et leurs âmes chantaient dans les clairons d’airain ». Et on se demande ce que Guy Mettan viendrait y faire.

 

Ou bien, les Vieux-Grenadiers n’incarnent plus du tout cet élan de grognards d’inspiration profondément républicaine. Et alors, à quoi bon prétendre en faire partie ?

 

Car enfin, si c’est juste pour la camaraderie assise de la choucroute et du cassoulet, où ruminent les commensaux en écoutant le lent travail de digestion de leurs viscères assoupis, point n’est besoin de rêver Valmy, Jemmapes ou Rivoli.

 

Si c’est juste pour être dans un club, un de plus, entretenir l’horizontalité repue des réseaux de connaissances, échanger des cartes de visite, envisager nominations, postes et prébendes, point n’est besoin de raviver les souvenirs de gloire, ceux des temps où les hommes étaient debout.

 

Non, si c’est juste pour cela, la banalité du quotidien suffit.

 

Pascal Décaillet

 

 

 

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