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Quand Hugues Hiltpold se trompe de cible



Jeudi 14.08.08 – 08.30h

Dans un pamphlet publié aujourd’hui par l’Hebdo, et intitulé « La girouette ignore l’odeur du vent », le président du parti radical genevois, Hugues Hiltpold, attaque son confrère du Conseil national, le démocrate-chrétien vaudois Jacques Neirynck, avec des pointes de violence si peu usuelles, chez lui, que cela mérite réflexion.

Peu usuelles, oui : Hugues Hiltpold, homme posé, compétent, se trouve être l’un des personnages les plus courtois de notre univers politique. Là, il attaque Neirynck sur l’initiative anti-minarets. Non sur le fond : ils sont d’accord, l’un et l’autre (et, avec eux, toute personne raisonnable en Suisse), pour la rejeter sans appel. Mais parce que le même Neirynck avait accepté, pour les élections fédérales de l’an dernier, l’apparentement du PDC vaudois avec l’UDC (Union démocratique fédérale), l’un des partis à soutenir l’initiative. L’occasion de démasquer cette ambivalence de sacristie, évidemment, et de tenir un beau discours sur la direction du vent, était trop belle.

Soit. Mais de là à jeter à un homme comme Jacques Neirynck les mots « girouette », « hypocrite », « Tartuffe », et lui asséner la bonne vieille leçon laïcarde, fazyste à souhait, combiste, waldeck-rousseauiste, des radicaux genevois, dès qu’affleure un sujet à connotation religieuse, on pouvait attendre mieux de la tenue et de la classe auxquelles, jusqu’ici, Hugues Hiltpold nous avait habitués. Car enfin, cette initiative, Neirynck la rejette. Ce qui est l’essentiel. Les vrais adversaires, ce sont ceux qui la soutiennent, non ?

Et puis, quoi ! Nous ne sommes plus dans la France de 1905, ni dans la Genève de 1907, il n’est plus nécessaire de sermonner à tous crins, à longueur de journée, sur la laïcité, principe admis par une écrasante majorité de nos concitoyens. On dirait que certains n’en peuvent plus de bonheur d’avoir lu quelques ouvrages sur le début du vingtième siècle, l’affaire des inventaires, le général André, la séparation de l’Eglise et de l’Etat. Il faut voir les proportions que peut atteindre, chez certains radicaux valaisans, encore aujourd’hui, du côté de Fully ou de Martigny, l’anticléricalisme le plus caricatural. Comme si l’Eglise catholique représentait aujourd’hui, en Suisse, le moindre danger pour la solidité de l’Etat. Quand on sait que certains de ces Valaisans inspirent au plus haut niveau l’idéologie du parti radical genevois, on commence à comprendre.

Il serait beaucoup plus intéressant de se demander pourquoi le radical Hiltpold en veut au PDC de certaines alliances avec des partis d’origine confessionnelle, parfois protestante, d’ailleurs. Il y a une explication : en choisissant, au début de la législature, de former un groupe commun avec les Verts libéraux et le Parti évangélique, le PDC s’est payé la petite insolence de dépasser le groupe radical-libéral, aux Chambres fédérales. Prise de position tactique, évidemment, en attendant la reconquête du deuxième siège au Conseil fédéral. Ce que les radicaux, on l’imagine, n’ont que très modérément goûté.

Surtout, il y a beaucoup mieux et beaucoup plus urgent à faire, quand on est radical, en Suisse, en août 2008, que d’attaquer un démocrate-chrétien. Et vice-versa. Le Sonderbund, depuis longtemps, est oublié. Les valeurs que défendent ces deux partis, y compris sur les sensibles questions confessionnelles, sont les mêmes. Dans quelques années, il n’y aura plus ni parti radical, ni parti démocrate-chrétien, mais quelque chose de plus grand, de fédéré, occupant tout l’espace entre la gauche et la droite nationaliste. Cette évolution-là est inéluctable. Le monde que défendent Hugues Hiltpold et Jacques Neirynck est le même. Dans un contexte où Fulvio Pelli ne craint pas d’attaquer gratuitement Christophe Darbellay, le signal de discorde de l’Hebdo d’aujourd’hui n’était pas nécessaire.

Enfin, sur le fond : lorsque Hugues Hiltpold affirme que tout mouvement religieux doit accepter explicitement l’ordre juridique suisse, il a évidemment raison. Le catholique qui signe ces lignes n’en a jamais disconvenu une seule seconde. Et cela, pour l’immense majorité de nos compatriotes, va de soi.

Pascal Décaillet










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