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Le peuple, pas la foule!



Édito Lausanne FM – Jeudi 13.03.08 – 07.50h



Attention, ce matin, je vais sortir mon grec. Que ceux qui n’aiment pas cela s’abstiennent de me lire. Mon grec, pour répondre à un lecteur de mon billet d’hier, qui a tenté de faire croire que, dans ma défense de la souveraineté du peuple, je prônais l’incandescence désordonnée de la foule contre la sagesse d’une assemblée.

Non, le peuple, ça n’est pas la foule. Non, une décision du peuple, ça n’est pas un lynchage. Non, l’espace où le peuple est souverain, ça n’est pas le Far West. Je n’ai jamais été ni pour la foule, ni pour le lynchage, ni pour le Far West. Je déteste même cela, par-dessus tout.

Le mot « peuple », en français, est bien maigre, sémantiquement. La langue grecque, fondatrice de tant de textes politiques, de Thucydide à Aristote, est, à ce sujet, beaucoup plus claire que la nôtre. Laissons « ethnos » qui, dès Pindare, fait référence à la tribu, la loi du sang. La dualité qui nous intéresse, là, c’est « dêmos , le peuple comme corps électoral, constitué, organisé, contre « plêthos », la foule en colère, les grandes masses en révolution, par exemple, dans la « Guerre du Péloponnèse », lorsque les Cités se soulèvent.

Le « peuple » que je décris comme la pierre angulaire de la démocratie suisse, c’est évidemment « dêmos ». Ça n’est pas l’entier d’une population (« Bevölkerung ») ; ça n’est même pas le corps électoral ; c’est la portion de ce corps qui veut bien, quand on le sollicite, s’exprimer sur un bulletin de vote. Dêmos, c’est le peuple comme organe de la démocratie. Son expression a ses règles, très précises. Il n’a jamais été question qu’il hurle son avis. Lorsqu’il tranche, en Suisse, à peu près quatre dimanches par an, c’est à l’issue d’un long procédé, où toutes les instances ont pu s’exprimer. C’est cela que j’appelle « le peuple ». Cela n’a rien à voir avec la rue.

Le peuple, comme organe de la démocratie. Organe, parmi d’autres : le Parlement, la justice, etc. Mais organe dont je souhaite - j’assume cette position - que tout procède. Les députés, il les élit. La Constitution, il peut la modifier. Les institutions, aussi. Je ne demande à personne de partager ma vision de la primauté du suffrage universel. Mais, de grâce, qu’on ne vienne pas la caricaturer en parlant de foule et de lynchage.


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