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Liberté - Page 383

  • Madame Fontanet, songez au plus grand nombre !

     
    Sur le vif - Dimanche 07.02.21 - 16.39h
     
     
    Madame Fontanet, regardez SVP les VRAIS PROBLÈMES de la population genevoise : économie exsangue, retraites qui stagnent, primes qui s'envolent, classes moyennes qui étouffent sous VOTRE pression fiscale, pour payer VOTRE dette, puisque désormais vous en acceptez le principe, pouvoir d'achat qui s'effondre.
     
    Comment, dans ces conditions, ne pas prendre comme un écran de fumée, ou un paravent sémantique et rhétorique, votre Croisade sociétâââle ? Parler d'autre chose, pour faire oublier l'essentiel.
     
    Madame Fontanet, songez SVP au plus grand nombre. Ceux qui souffrent de la crise. Ceux qui n'en peuvent plus de payer, et ne peuvent pas mettre un sou de côté. Ceux dont personne ne parle jamais, parce que prendre leur défense ne relève d'aucune mode. Ils sont innombrables, c'est pour eux que nous tous, citoyennes et citoyens de ce canton, devons nous mobiliser à fond.
     
    Les questions sociétâââles ? Nous les traiterons aussi. Nous n'en sous-estimons pas la substance. Mais désolé, le degré d'urgence, et surtout la masse des gens concernés, n'ont strictement rien à voir. On doit faire de la politique en priorité pour le plus grand nombre, sauf à sombrer dans une béatitude bobo à laquelle, jusqu'à récemment, vous me sembliez heureusement avoir échappé.
     
    Alors, désolé de vous le dire, mais votre credo sociétâââl, s'il a certes la fougue des néo-convertis, apparaît comme particulièrement décalé, en termes d'urgence, dans les circonstances actuelles, à une bonne partie de la population.
     
    Je pensais jusqu'ici que ce décalage était la marque de fabrique d'une certaine gauche bobo-urbaine, branchée, déracinée de la classe ouvrière et du prolétariat. Je ne pensais pas qu'il irait jusqu'à contaminer la magistrate compétente que vous êtes, soucieuse du bien public.
     
    Je m'étais apparemment trompé. Comme sur votre collègue M. Dal Busco, qui ne rêve plus que mobilité douce, pistes cyclables, transferts modaux, et reports de charges.
     
    Nous sommes bien peu de choses face à la ductilité de la nature humaine.
     
     
    Pascal Décaillet

  • Les primes s'envolent ! Et personne ne bronche ?

     
    Sur le vif - Dimanche 07.02.21 - 14.24h
     
     
     
    Et les primes qui vont encore augmenter drastiquement, cet automne, pour 2022 ! Et les Suisse qui découvrent cela, en lisant la Sonntagszeitung, ce matin ! Et le gentil M. Berset qui continue de promener, dans tout le pays, un visage de père tranquille de la nation. Et ses homologues, ministres de la Santé, dans les cantons, omniprésents dans les "points presse" (quel odieux anglicisme !), avec leurs grands airs d'experts !
     
    Mais où est passé, dans le public, le sens le plus élémentaire de la responsabilité qu'implique un engagement dans un exécutif ? Ce pacte avec le peuple, cette parole donnée, et respectée, qui, en sept mois (18 juin 1954 - 7 février 1955), avaient fait de Pierre Mendès France le seul véritable homme d'Etat de la Quatrième République ?
     
    D'où vient cette gentillesse des Suisses, qui confine franchement à l'obédience aveugle, face à leurs "autorités" ? Mais enfin, personne n'est obligé de devenir Conseiller fédéral, ni Conseiller d'Etat ! Ceux qui occupent ces postes l'ont voulu, ils ont tout fait pour y parvenir, ils ont écrasé des concurrents, ils règnent en plaçant leurs hommes, ils bétonnent leur place au pouvoir. Et il faudrait, Dieu sait pourquoi, les ménager ! Se prosterner. Leur faire confiance à tout prix : "Leurs journées sont longues, les pauvres, ils n'ont pas la vie facile !".
     
    Nous devons rétablir, pour les ministres, cantonaux ou fédéraux, le principe élémentaire de responsabilité. Ils s'engagent sur des projets. Ils réussissent, ou ils échouent. Dans le second cas, il doivent tout simplement partir. Sans haine de la part du peuple. Sans jugement de valeur sur leur personne. Sans les écarter du corps social. Mais simplement parce que, dans le principe de responsabilité, comme un général dans une bataille, ils n'ont pas réussi.
     
    Si les Suisses laissent passer benoîtement cette annonce sur la hausse des primes cet automne, sans songer à appliquer à personne le principe de responsabilité, alors tant pis pour eux. Il n'est pire soumis que celui qui s'en accommode.
     
     
    Pascal Décaillet
     

  • Le droit de vote appartient aux nationaux

     
    Sur le vif - Dimanche 07.02.21 - 01.38h
     
     
    Le droit de vote doit appartenir aux nationaux, et à eux-seuls. Aux membres de la communauté nationale, avec ses droits et ses devoirs. À ceux qui ont servi, et servent encore, cette communauté.
     
    Les nations, les frontières, la préférence aux nationaux, tout cela a un sens. Fruit d'une Histoire, d'une mémoire, d'un rapport au passé, à la durée, à la continuité. Souffrances communes, cicatrices communes, valeurs communes, c'est cela qui crée le sentiment d'appartenance.
     
    En allemand, cette émotion partagée porte un très beau nom, sur lequel, comme vous savez, j'ai beaucoup travaillé : cela s'appelle Gemeinschaft. Il y eut un moment, à partir des années 1770, où les Allemagnes prirent congé de l'Aufklärung, ces Lumières blafardes d'abstraction universelle, pour se plonger à corps perdu dans les retrouvailles avec leur langue, la richesses de leurs mots, de leurs dialectes, de leurs récits : ce fut le Sturm und Drang, puis le Romantisme. Ce fut le travail exceptionnel des Frères Grimm sur le trésor lexical de la langue allemande. Ce sont ces valeurs, ces démarches, qui constituent la Gemeinschaft. Et qui jettent les bases d'une nation. Nous sommes au cœur du sujet.
     
    Ceux qui veulent donner le droit de vote à toute la population, juste parce qu'elle est là, obtiendront exactement le contraire de leurs desseins. Ils feront monter, du cœur blessé des patriotes, la rage légitime de se voir dépossédés, au profit d'un maelström indifférencié, de l'acte majeur de leur qualité citoyenne : pouvoir décider du destin national. Cette différence est leur fierté, ne jouons pas avec cela.
     
    L'humanité n'est absolument pas universelle, du moins dans l'ordre politique. Elle est l'addition de nations différentes, surgies de souches multiples, avec, pour chacune, son Histoire propre, ses mythes fondateurs, ses tensions internes, son rapport à la langue, aux mots, ses lieux de mémoire. Aucune Histoire nationale ne peut être reportée sur une autre. Chacune doit être étudiée en soi, dans ses particularités. Ca passe par la langue, par les mots, par les récits. Le concept d'Histoire universelle est une imposture de Grand Horloger, déracinée du réel, glacée d'abstraction.
     
    Si un étranger veut voter, il doit d'abord accomplir le chemin de naturalisation. Il doit entrer, doucement, en prenant soin de frapper à la porte, dans cet univers de représentation (Darstellung) qui fonde une communauté nationale. Ceux qui, motivés, pleins de cœur pour leur pays futur, heureux d'en étudier l'Histoire et les institutions, se frottent à ce rite, constituent un exemple pour tous. Ils nous rappellent nos propres valeurs. Ils régénèrent notre sève nationale.
     
     
    Pascal Décaillet