Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Sur le vif - Page 1102

  • Philippe Souaille et la nuit des grandes peurs

     

     

    Transformer en les détournant les propos d’un commentaire, diaboliser celui qui ne pense pas comme lui, sa faire passer soi-même pour l’homme des Lumières, le patient exégète de la clarté du monde, là ou l’autre ne charrierait que forces obscures, passions inavouables, si ce n’est une ancestralité confessionnelle qui aveuglerait sa conscience. Telle est la stratégie récurrente du blogueur Philippe Souaille. Il y aurait d’un côté le Compas et l’Equerre, le logos argumenté, la qualité dialectique du discours articulé (bref, lui-même, Philippe Souaille), et, en face, la honte rugissante de l’image, la nuit des grandes peurs, l’inavouable des primitifs.

     

    Dernier exemple en date : le thème de la frontière. Dans un édito publié lundi dans la Tribune de Genève, je pose, poliment et calmement, la question de « la corrélation entre le chiffre (record) du chômage à Genève et l’accès des frontaliers au marché de l’emploi. Cette question (ajouté-je), au moins, mérite qu’on l’étudie. Sans passion, sans rejet de l’autre. Il n’y a, dans cette démarche, rien de xénophobe ».

     

    Cette question (à laquelle je ne donne d’ailleurs pas de réponse, car je suis loin d’être un adversaire de la libre circulation), il se trouve que beaucoup de gens, à Genève, se la posent. En tout cas depuis la campagne de l’automne 2005. Peut-être ont-ils tort, mais pour le moins faudrait-il qu’en face, notamment du côté de François Longchamp, on leur réponde avec suffisamment de conviction pour apaiser leurs angoisses. Avec ces fameux « arguments », hérités de la pensée dialectique (qu’elle soit celle d’Aristote, des Lumières ou de Hegel), oui l’argument, plutôt que l’opprobre, le mépris, la diabolisation. Car dans ce second cas, on conforterait le sentiment qu’il y aurait les gens d’en haut, qui ont compris (et qui, comme une cléricature, n’auraient plus qu’à expliquer les bienfaits de la libre circulation à ceux d’en bas), et puis les autres, la masse informe qui serait une proie si facile pour les partis aux idées courtes.

     

    Cette manière d’envisager le débat n’est pas digne de la conception républicaine dont se réclame (à juste titre) Philippe Souaille. Le vrai débat, c’est d’affronter l’autre. Non pas en lui disant qu’il n’a rien compris, ni en lui brandissant en ostracisme ses adhésions spirituelles, mais en alignant des arguments. Car plus Philippe Souaille et les siens nous joueront la puissance des Lumières (dont je ne sache pas qu’ils soient les seuls dépositaires) face à l’archaïsme de la nuit, moins leurs idées, avec ce qu’elles ont d’intéressant, n’avanceront. Une histoire d’arroseur arrosé, en quelque sort. Ou d’éclaireur jeté dans la pénombre.

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

     

     

  • François Longchamp et ses Bulletins de la Grande Armée

     

    Il n’est pas question ici de mettre en doute la bonne volonté de François Longchamp dans sa lutte contre le chômage à Genève. Ni non plus, encore qu’il convienne d’en discuter, la pertinence de ses choix politiques. Mais il y a un problème avec les chiffres. La manière de les présenter. L’impossibilité de reconnaître, en le disant clairement, avant toute chose, que Genève est lanterne rouge nationale.

    Alors, on prend le réel, et on lui tord un peu le cou : on inonde les communiqués – et chaque prise de parole officielle, dûment instillée à tout locuteur agréé, notamment les chefs de service – du fait que « le chômage progresse moins à Genève qu’en moyenne suisse ». C’est sans doute vrai. Mais reste que le chiffre absolu, celui qu’on retiendra au final, ce sont les 7,4% (selon Anne Emery-Torracinta ; 6,6% selon François Longchamp, nous ne trancherons pas dans ce différend) de lanterne rouge nationale.

    Alors, déni ou simple enjolivement ? Perfectionnisme de trop bon élève qu’insupporte, comme un miasme, l’idée même de mauvais résultat ? Difficile de ne pas voir, dans ce rapport aux chiffres, le savant travail de corsetage du discours par le président du Conseil d’Etat genevois et sa très efficace Garde noire. Bonaparte, c’est vrai, avait lui aussi, dès la campagne d’Italie, les célèbres « Bulletins de la Grande Armée », où nul rappel de propagande n’était laissé au hasard. Mais lui, au moins, jour après jour, remportait des victoires.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Thônex : victoire libérale et leçons d’un scrutin

     

    Sur le vif - Dimanche 21.03.10 - 14.26h

     

    Le monde politique genevois attendait avec intérêt, ce week-end, le résultat de l’élection complémentaire à l’exécutif de Thônex, suite à l’arrivée d’Isabel Rochat au Conseil d’Etat. C’est, comme il fallait s’y attendre, la victoire du dauphin de l’ancienne maire de Thônex, le libéral Pascal Uehlinger : 1342 voix (41,9%). Puis, le candidat de gauche, Alain Dupraz : 1122 voix (35%). Enfin Jean Villette, poulain du MCG : 689 voix (21,5%).

     

    Election hyper-locale, certes, qui rend vaine toute extrapolation sur les municipales qui auront lieu dans tout le canton au printemps 2011. On notera tout de même que ni la droite classique, ni la gauche ne peuvent seules obtenir de majorité. L’effet Villette n’aura certes pas eu la même force d’entraînement que l’effet Cerutti à Vernier, mais avec plus d’un électeur sur cinq, le MCG se confirme, à Thônex comme ailleurs, comme l’arbitre dans les communes genevoises. Ainsi, dans l’hypothèse d’une alliance gauche-MCG, la droite était clairement tenue en échec.

     

    A Thônex comme ailleurs, l’émergence de cette nouvelle force politique, dans le canton, devra être prise au sérieux autant à droite qu’à gauche. Les regarder de haut en les traitant de populistes ne servira pas à grand-chose. Il faudra composer, tout en gardant en tête la finalité suprême. Cela porte un nom : cela s’appelle la politique.

     

    Pascal Décaillet