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  • La politique, ça n'est pas la morale !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 08.09.21

     

    La politique, ça n’est pas la morale. Ni les bons sentiments. Ni les grandes déclarations universelles, du type de celles dont raffole la Ville de Genève, phare éthique dans l’obscurité bleutée de l’univers. La politique, ça n’est pas la tyrannie de l’émotion. Ça n’est pas à confondre avec l’humanitaire. Ça n’est pas une succursale des grands courants religieux. La politique, c’est l’art d’administrer au mieux une communauté humaine donnée (ville, canton, nation), circonscrite dans un périmètre précis, liée à l’interne par un partage de la mémoire, un culte des morts, la reconnaissance de valeurs, une codification écrite qui s’appelle la loi.

     

    Citoyennes et citoyens, détenteurs du pouvoir ultime dans ce pays, nous attendons des élus qu’ils défendent en absolue priorité les administrés dont ils ont la charge. Ils ne sont pas au service de la planète tout entière, ni d’un quelconque « universel ». Non, ils sont là pour défendre les intérêts de leur ville, leur canton, leur nation, en fonction de l’échelon où ils ont été élus. Pour les grands discours cosmiques, si on y tient à tout prix, merci à chacun de se référer à son prêtre, son pasteur, son modèle spirituel ou son gourou, chacun est libre. Mais la politique, c’est autre chose.

     

    A Genève, le poids de la morale dans le discours public devient insupportable. Et pas seulement à gauche ! Un certain parti du centre, où le parfum de sacristie s’accroche à la moiteur des choix, persuadé de brandir l’étendard du bien et de cheminer, comme en procession, vers la rédemption, n’en peut plus de se rallier à la gauche morale. Sur les questions d’asile, par exemple, où il est tellement aisé, du cénacle d’un Parlement, de se montrer ouvert, généreux, exemplaire pour le monde. Sans se soucier, une seule seconde, des dangers que certaines personnes accueillies un peu vite, sans un filtrage rigoureux, pourraient un jour faire courir à notre société, à nous. L’Allemagne regorge d’exemples, notamment en Prusse, en Saxe, en Thuringe, régions que je connais fort bien, où la grande générosité de 2015 donne à la population de base, fort modeste et précaire, des occasions de regrets et d’amertume.

     

    Dire cela, ça n’est pas mettre en cause la tradition d’asile. Mais notre population, à nous, a le droit d’être exigeante pour sa propre sécurité. Il n’y a là aucune xénophobie, encore moins de racisme, juste l’appel à la prudence. Ça rend moins populaire que les grands discours universels, eh bien j’assume : il faut dire les choses telles qu’elles sont, regarder autour de nous, chez nos voisins. Car la politique, ça n’est pas la morale, pas plus qu’elle ne serait d’ailleurs l’absence de morale. Ces deux domaines doivent dialoguer, s’interpeller, mais en aucun cas se confondre l’un avec l’autre. Méfions-nous des bons sentiments, des grandes envolées universalistes. Défendons, en absolue priorité, notre communauté de destin, ici. C’est déjà une très grande ambition.

     

    Pascal Décaillet

  • La vie. La vraie vie.

     
     
    Sur le vif - Mardi 07.09.21 - 12.44h
     
     
    Il y avait hier soir le Messie de Haendel, sur Mezzo, dans une très belle version, à la Chapelle Royale de Versailles. Avec notamment la soprano Sandrine Piau parmi les solistes, et Hervé Niquet à la direction.
     
    Le Messie fonctionne auprès de moi exactement comme la Walkyrie, les Noces, et quelques dizaines d'autres chefs d’œuvre, de Beethoven à Bartók, en passant par Richard Strauss, Sibelius, et tant d'autres. C'est toujours la même chose : comme je les connais par coeur depuis des décennies, je me dis que je vais juste regarder le début, pour me faire une idée de l'interprétation. Et puis, au lit !
     
    Las ! Deux heures plus tard, ou trois, ou quatre, bref au moment de la note ultime et des applaudissements, je suis toujours là, scotché. Pendant toutes ces heures, j'étais ailleurs. Non dans une fuite, surtout pas. Mais au coeur de la présence la plus vive, la plus centrale, la plus éveillée. Au coeur du monde.
     
    Quand j'écoute les derniers Quatuors de Beethoven, ou Brahms, ou Mahler, c'est l'intensité de ma propre vie qui se décuple. Toute fatigue dissipée, abolie, place à l'hyper-lucidité, dans l'immobilité d'un canapé. La vraie vie est là.
     
    Ces oeuvres, vous ne les consommez pas, quel horrible mot d'ailleurs. Non, ce sont elles qui vous dévorent. Et cette voracité, loin de vous anéantir, a paradoxalement le miracle de vous régénérer.
     
    La vie, la vraie vie.
     
     
    Pascal Décaillet