Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

- Page 7

  • Voter compact - Et quoi encore ! - Leur faire couler un bain ?

     

    Sur le vif - Dimanche 03.11.13 - 15.53h

     

    Voter compact. Ils n’ont que ces quatre syllabes, dont les deux dernières résonnent d’ailleurs d’une insondable laideur en toute oreille un rien sensible à la musique des mots. Eux, ce sont les états-majors des partis, non les candidats mais les apparatchiks et les chefs de campagne. Ils nous demandent,  à nous citoyens, de « voter compact », par exemple les chefs de l’Entente aimeraient beaucoup que leurs électeurs votent pour les cinq de leur alliance, sans rien biffer ni rien ajouter. Soit. C’est un calcul tactique. En nous nous permettrons d’ajouter : c’est cela, et rien de plus.

     

    Ils le demandent, et ils le font avec une telle insistance (lorsqu’ils n’essayent pas d’en faire une sorte d’impératif moral), que ça commence à en devenir pénible, fatiguant, et même franchement déplacé. Il convient donc de leur répondre.

     

    Voter compact, c’est quoi ? C’est juste un truc de politicards, de droite comme de gauche, pour pouvoir gonfler un maximum les pectoraux le dimanche du vote, et surtout garder leurs postes de présidents de partis. C’est leur droit, leur jeu, leur intérêt. Ça n’est de loin pas celui des différents candidats, quand on prend la peine de discuter avec eux, et dont la cruauté, en petit comité, ne s’adresse pas en priorité à leurs adversaires, disons-le comme ça par euphémisme. Croyez-moi, le souci premier du candidat à un exécutif, ça n’est vraiment pas le vote compact, il tente juste de nous le faire croire. Son seul but, bien sûr, c’est d’être élu, lui, et le reste on verra.

     

    Surtout, cette obsession du vote compact ne concerne en rien le citoyen. Chacun d’entre nous est totalement libre. De voter ou non. De voter compact, ou non. Et la récurrence de plus en plus insupportable de ce mot d’ordre, c’est une incursion bien intempestive des partis dans une élection – celle du gouvernement – qui est avant tout affaire d’hommes et de femmes. Nous avons sept noms, au maximum, à inscrire sur une liste. Nous le faisons peut-être en fonction de l’orientation idéologique. Mais infiniment plus, en fonction de quelque chose de beaucoup plus fort, qui relève du fluide : la part de confiance que nous entendons accorder à tel ou tel candidat. Bien évidemment, elle transcende les barrières partisanes.

     

    Face à ce geste fort, presque sacré, lorsque vous écrivez à la main un nom et prénom, les sommations à « voter compact » paraissent bien dérisoires. Nul n’en est dupe. Une élection est l’affaire du corps des citoyens avec lui-même : qui entendons-nous envoyer dans un gouvernement ? Une affaire des citoyens avec les onze candidats. Beaucoup plus que l’affaire des partis. La répartition de ces deniers a été tranchée le 6 octobre. Là, nous sommes dans une autre campagne, une autre logique, infiniment plus personnelle. Ces hurlements à voter compact ne sont pas loin d’une violation de notre intimité citoyenne. Vous seriez très gentils, Mesdames et Messieurs les chefs de partis, de nous foutre un peu la paix avec vos injonctions compactées. Elles polluent.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Plus la peine de voter : Pierre Ruetschi a les résultats !

     

    Sur le vif - Samedi 02.11.13 - 18.46h

     

    En découvrant ce matin l’éditorial de la Tribune de Genève, j’ai immédiatement pensé au discours prononcé le 27 janvier 1978 par Valéry Giscard d’Estaing à Verdun-sur-le-Doubs. VGE est au pouvoir depuis bientôt quatre ans (mai 1974), les législatives approchent, la gauche commence à faire peur (elle échouera, finalement, le 19 mars, et je me souviens des yeux rouges de Michel Rocard), alors le président de la République sort de sa réserve, et, dans cette paisible commune de Saône-et-Loire, indique aux Français ce qu’il considère comme « le bon choix » pour la France.

     

    « Le bon choix pour Genève », c’est l’édito de Pierre Ruetschi, ce matin. Un texte qu’on peut qualifier de prophétique, puisqu’il ne nous livre rien de moins que les résultats de l’élection du 10 novembre. On y apprend que François Longchamp (« stature, sens incontestable de l’Etat, intelligence politique ») et Pierre Maudet (dont on salue le « bilan » alors qu’il n’est là que depuis seize mois) seront réélus, ainsi que « le solide Serge Dal Busco », nettement préféré par l’auteur au « tournoyant Luc Barthassat », lequel devrait passer «avec un peu de chance ».

     

    On y apprend encore que « la gauche, qui part à trois, devrait obtenir en toute bonne mathématique électorale au moins deux sièges ». Thierry Apothéloz, avec un mépris assez saisissant, est immédiatement qualifié de « joker », puis de « falot ». Donc voilà élus Anne Emery-Torracinta et Antonio Hodgers. Le dernier siège devrait se jouer entre Mauro Poggia et le joker. Dans un réflexe digne des plus riches heures des Fronts républicains contre la Bête immonde, l’éditorialiste choisit le joker. Et voilà notre septuor. Pas belle, la vie ?

     

    Le septuor désigné par le rédacteur en chef de la TG se trouve être, par le plus grand des hasards, à peu près le même que celui du « sondage » (sur le prodigieux échantillon de 213 personnes) publié cette semaine par le même quotidien. Dans ces conditions, nous les citoyens, qui recevons des enveloppes de vote, faut –il absolument que nous perdions notre temps à accomplir notre devoir électoral ? Puisque de toute manière, Pierre Ruetschi le fait pour nous. La TG, par deux fois en quelques jours, ne nous dit même plus pour qui il faut voter, dans la bonne tradition du Nouvelliste de mon enfance. Non, elle franchit une étape supplémentaire : elle nous dit qui sera élu.

     

    A ce niveau-là, la géniale Cassandre et la Pythie de Delphes apparaissent comme des apprenties, des modèles de cécité et d’impéritie. Citoyens, plus la peine de voter, ni même de se triturer les méninges : Pierre Ruetschi a déjà tous les résultats, Céline Amaudruz et Eric Stauffer ne sont même pas nommés, François Longchamp entre au Panthéon des hommes d’Etat, et Pierre Maudet peut s’enorgueillir, après seize mois, d’un bilan. Quant au « tournoyant Barthassat », notre bleuté prophète, après avoir réglé son sort avec cette chiquenaude verbale, l’envoie tournoyer en d’improbables tournois. Dieu que la vie est belle, lorsque les géomètres du prévisible nous délivrent de nos périssables incertitudes.

     

    Pascal Décaillet