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  • Darbellay, forme olympienne

    Pas encore 38 ans, des dents comme des poignards, une dionysiaque ivresse de vivre, une attraction magnétique pour l’altitude, celle du pouvoir. Alors, il marche. Il les connaît, ces cabanes de mon enfance, lever à 2 heures du matin, le guide qui réveille toute la chambrée, et on s’équipe et on s’harnache. Cliquetis, chaussures, on grommelle, ou maugrée, mais on y va, dans le froid. Lampe frontale. Et départ pour la Ruinette. Ou le Pigne. Et c’est l’arête, comme une lame : à gauche le vide, à droite le vide. Le destin d’un centriste. Disons juste une hyper-sensibilité à la direction du vent, il faut bien rester debout, non ?

    Depuis quelques jours, Darbellay-le-Cosaque s’est mis en tête de harceler Merz. Le pauvre argentier est en pleine retraite de Russie, et l’autre, la nuit, hulule et vocifère, menace, gronde, tournoie. Plus une seule intervention sans qu’il ne demande quasiment la tête du président de la Confédération ! Bon, c’est clair, il la veut, la place de Couchepin : aussi vrai que les Français parlent aux Français, les Valaisans succèdent aux Valaisans, alors ça le tenaille, ça le travaille, ça fermente au-dedans. Et ça se voit, tellement ! L’ambition du pouvoir, c’est comme l’amour : il y a un moment où on ne s’en cache même plus. La fuite en avant. Vers quel destin ?

    Reste que cette voracité assumée fait plaisir à voir. Avec ou sans le Kilimandjaro, un fauve reste un fauve. Il est né comme ça, Darbellay, et en plus il a la compétence, et une force de travail exceptionnelle. Son destin est d’essayer de conquérir le pouvoir. Il réussit ou non, mais l’appel de la chasse, régulièrement, l’invite à reprendre le sentier de la guerre. Pour ma part, je préfère mille fois cette franchise dans le rapport au pouvoir à l’hypocrisie de ceux – ou celles - qui en crèvent tout autant d’envie, dans leurs viscères, mais se contentent « de se tenir, le cas échéant, à la disposition de leur parti ».

    La Suisse va traverser des temps difficiles. Pour affronter les tempêtes, il faut des caractères. Pas des gentils. Pas des doux. Des caractères.

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

  • La nausée par l’équilibre

    Sur sept conseillers d’Etat genevois, cinq se représentent. Autant dire que la marge de renouvellement de l’électeur, si ce dernier devait appliquer avec obédience les consignes des partis, est bien faible !

    Donc, justement, pas d’obédience. Pas de fidélité aveugle. Du sens critique, du droit d’inventaire, de l’imagination : on a trop longtemps, dans ce pays, reconduit par automatisme, par routine, des équipes fatiguées. Copains, coquins, compagnons de réseaux, amitiés transversales, jeu de ficelles où tous se tiennent. Terroir, Territoire, amicales, tutoiements, bedaines de cocktails, réconciliations à la buvette, quand ça n’est pas sur l’oreiller. La bonne vieille politique de toujours, à gauche comme à droite d’ailleurs, bien pépère. Avec une incantation, magique : l’équilibre.

    Mais c’est quoi, l’équilibre ? C’est une force qui en annule une autre. En sciences physiques, c’est passionnant ; en stratégie de victoire, c’est un tantinet désespérant. Pour qu’une vision du monde l’emporte (pour quatre ans) sur une autre, il faut une dialectique d’affrontement, avec des moments d’offensive qui passent par un déséquilibre, un imprévu, une percée. Privilégier la guerre de mouvement sur celle de position. L’équilibre, il viendra bien plus tard. Comme résultante d’une confrontation, non comme donnée de base, pataude et résignée.

    Ainsi, quand j’entends dire que telle personne va casser la baraque sous le seul argument qu’elle « représente la sensibilité des communes », je me dis qu’il pourrait peut-être exister, ici-bas, des desseins un peu plus ambitieux. Oh, je ne demande pas Arcole, ni qu’on se saisisse chaque jour du drapeau pour franchir le pont sous la mitraille, mais enfin la « sensibilité des communes », j’ai connu des slogans de campagne plus exaltants.

    De quoi s’agit-il, cet automne ? D’élire un gouvernement, pour quatre ans, en période de crise économique et financière, qui malheureusement ne va pas se tasser d’ici novembre. Ce Conseil d’Etat aura besoin d’une action commune et cohérente, et pas juste tricotée pour le discours de Saint-Pierre. Il aura besoin d’hommes et de femmes de caractère, avec de l’audace, de la vision. De gauche ou de droite, l’électeur en décidera. Mais de grâce, des personnalités fortes. Pas des passe-murailles.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Une petite gifle, Darling ?

    Sur le vif - Dimanche 22.02.09 - 17.25h

     

    Il s’appelle Darling, ça ne s’invente pas, et déjà, depuis que je viens de prendre connaissance de son existence terrestre, il est mon chéri, mon trésor. Oh, le beau cas, étincelant comme une cuiller à thé trônant nue au milieu du living room.

    De son état, il est ministre britannique des Finances. Dans l’hebdomadaire « The Observer » de ce matin, il vient de donner ses ordres au dictaphone à notre pays sur ce que nous devons faire en matière de secret bancaire. En clair, l’abolir : « La Suisse doit réformer ses lois fiscales et bancaires pour les aligner sur celles de l’Europe ». Dont acte, Aye, Aye, Sir, et surtout pardonnez aux misérables vermisseaux de fromage montagneux que nous sommes, du haut de notre goitre, du plus profond de notre état d’arachnide de farine, de n’y avoir point songé plus tôt.

    Ils sont gentils, les ministres britanniques ou allemands des Finances. Chaque fois qu’ils parlent du secret bancaire, ils donnent quelques milliers de voix à la cause de son maintien. Parce que nous, les habitants de ce petit pays bien modeste, bien fragile, bien insignifiant face à la grandeur salée d’Albion, nous avons peut-être, en effet, à nous interroger sur le secret bancaire. Mais il se trouve que nous apprécierions de le faire entre nous, sans chancelier ni échiquier, sans pompes ni circonstances, sans les grands de l’Europe qui nous tannent et nous pourlèchent le poil.

    C’est ainsi. Les contours de notre destin, nous aimons les dessiner entre nous. C’est là notre petite faiblesse, notre péché mignon, notre Petit Liré contre vos Palatins. Cela, Monsieur le Ministre, porte un très beau nom, que votre pays a d’ailleurs maintes fois défendu avec panache dans l’Histoire : cela s’appelle démocratie.

    Pascal Décaillet