Commentaire publié dans GHI - Mercredi 13.09.23
Sans cohésion sociale, la Suisse n’existe pas. Depuis 1848, création de la Suisse moderne par les radicaux, toute l’aventure économique de notre pays, fantastique à bien des égards, s’est accompagnée, au fil des générations, d’une extension du champ de solidarité entre nos compatriotes. Ce fut lent, progressif, parfois laborieux (l’assurance-maternité a mis des décennies à voir le jour), mais ce chemin, nous l’avons fait. Les générations d’avant ont accompli leur mission. Nous, hommes et femmes, citoyens de ce pays que nous aimons, nous devons continuer.
Nous répondrons ainsi aux préoccupations les plus importantes des nôtres, qui ne sont de loin pas celles des « chercheurs en sciences sociales » de nos Universités romandes, infestées par les théories à la mode, autour du genre ou de la couleur de la peau. A qui des forêts de micros sont tendues à longueur d’année, ce qui crée, dans l’opinion publique, une vision complètement faussée des vrais problèmes, ceux qui touchent les lames de fond de la population.
En 1848, et encore en 1891 lorsqu’un premier non-radical, le catholique-conservateur Josef Zemp, arrive au Conseil fédéral, des enfants, dans toute l’Europe, travaillent encore dans les mines. Il faudra tout le vingtième siècle pour conclure les premières conventions collectives, les premières assurances contre la maladie, l’accident, les premières cotisations en vue d’une retraite. Il faudra la grande année 1947, qui devrait être célébrée dans notre Histoire au même titre que 1848, pour que naisse enfin l’AVS, le fleuron de nos assurances sociales, dix fois révisé depuis sa naissance. Et puis, 1985 pour le deuxième pilier. Et puis, le milieu des années 1990 pour une assurance-maladie obligatoire. Alors non, ça n’était pas mieux avant : vive le temps présent, vivent les générations d’aujourd’hui, nous ne sommes par pires que nos aïeux, nous avons juste à empoigner les vrais problèmes de notre temps.
Homme de droite, mais d’une droite sociale et patriote, je suis consterné par le manque d’imagination, et de projets sérieux, venant de la droite libérale (au sens très large de ce mot, je n’implique pas ici un parti), sur les réformes absolument nécessaires à entreprendre dans les deux grands chantiers majeurs que sont les retraites, et la santé. Dans ces deux domaines, désolé de le dire, mais c’est la gauche, et notamment les socialistes, qui voit grand : 13ème rente AVS, Caisse unique, Caisses publiques. Là, on n’est plus dans la réformette soupesée par de tristes apothicaires qui ne veulent, au fond, rien changer. Non, on s’installe dans une nouvelle dimension.
Oui, nous avons besoin, en matière de retraites, d’une nouvelle donne, aussi puissante que celle de 1947. Et, en matière d’assurance-maladie, d’un retour, au grand galop, de l’Etat, tant les acteurs privés, depuis trente ans, nous ont plongés dans la paupérisation des classes moyennes, étouffées par les primes. En matière d’assurances sociales, il faut l’Etat. Un Etat efficace, générateur de solidarité. Un Etat au service de tous, à commencer par les plus faibles.
Pascal Décaillet
Commentaires
Merci Pascal pour cette remarque très pertinente.
Vous êtes, pour moi et peut-être pour bon nombre d'entre nous, un explorateur avec une lampe frontale qui avance et qui avance vite dans ces galeries interminables, c'est pour cela que j'ai du mal à suivre dans le temps. Vos billets soulèvent la principale question: où sommes nous? Nous étions nous perdus dans ce cours tumultueux du fleuve souterrain? Où en sommes nous dans notre lutte pour rester à la surface de l'eau?
J'y reviendrai dès que j'en aurai le temps. C'est la seule question qui vaille la peine d'être posée pour la droite: Que sétait il passé pour elle? Roupillait elle? Etait-elle hypnotisée? Par quoi? Etait elle larguée et trahie par ses pairs? Sa lutte pour sa suprématie à domicile ne sera-t-elle pas vaine et inutile? La nomenclature nationale, a-t-elle été dépossédée? Par qui?
Mais la gauche, quelles sont les causes qui l'ont rendue inexistante depuis deux décennies? A-elle été supplantée? Les mèmes ont-ils pris sa place? Ses luttes, pourtant légitimes, étaient elles en porte-à-faux?
Avait-elle glissée pour n'agir qu'en périphérie, sur le mal subsidaire au lieu d'être partie intégrante d'un ensemble systémique?
Comment cette cohésion a-t-elle pu se rompre, grâce à qui, à quoi? et dans sa rupture, quelle survie pour la droite? Rejoindre l'élite mondialiste et multimilliardaire semble être une corde raide. Ne l'avait tissée avec le PPP déséquilibré et en écrasant tout le reste sous ses pieds?
D'année en année, elle se retrouve éloignée et carrémemt écartée de cette élite qui ne lui tend pas la main, toujours suspendue à la corde et le vide en dessous.
Comme pour le climat, il y a comme une inversion des pôles: elle se retrouve abruptement déclassée et reléguée au rang de personnels du multinational, de la grande industrie, notamment financière, privée des honneurs et des grands titres.
La question du pouvoir et de la place des états nous hante sans que nous n'osions la partager. C'est comme un projet d'art ou de gros-oeuvre dont chaque chapelle politique veut avoir sa paternité. Un jour, il faudra bien la déballer en public pour un grand débat.
Et comme pour la question de justice fiscale (physique et morale) et sociale (Caisse-Maladie, LPP, SUVA et AVS), qui doivent fonctionner de manière intrinsèquement liée, il faudra revoir notre système politique et économique, notre compréhension du monde, nos institutions et notre conscience polititque. Peut-être une nouvelle constitution nationale et de nouvelles relations cantonales avec une répartition intelligente et équitable des tâches seront elles nécessaires.