Sur le vif - Mardi 11.10.22 - 10.04h
Ils ne font pas grève, ceux qui s'apprêtent, dans les années qui viennent, à secouer durablement notre société suisse, et celles de nos pays européens.
Ils ne font pas grève. Vous savez ce qu'ils font ? Ils bossent.
Ils bossent, bossent, et bossent encore. Ils s'intéressent à leur boulot, et non aux rapports contractuels. Au centre, ils placent le fond des choses : la finalité de leur travail. La qualité de finition. C'est l'une de vertus des Suisses, reconnues à la ronde. Nous avons à en être fiers. Être un maniaque du travail bien fait n'a rien de risible : c'est une éminente qualité, une marque de civilisation.
Ils ne font pas grève. Ils triment. Et n'en peuvent plus d'être tondus par les taxes, les impôts, toute cette voracité de l'Etat-Moloch, celui qui ne leur accorde jamais, à eux, la moindre subvention, celui qui ne songe qu'à tout leur prendre. Ce même Etat qui laisse tomber nos personnes âgées, préfère l'altérité aux nôtres, ne songe qu'à entretenir sa propre machine, sous prétexte de "moyens pour subvenir aux besoins de la population".
Il ne subvient pas aux "besoins de la population" ! Mais aux siens propres. Il engraisse son propre fonctionnement. Il veut engager, et engager encore. Que la fonction publique fasse grève, et immédiatement, en période électorale, elle aura gain de cause, aucun souci, c'est joué, plié, la classe politique n'osera pas s'opposer à elle. C'est mécanique.
Ils ne font pas grève, ceux qui ne tarderont pas, dans les années qui viennent, à secouer notre système, et ça pourrait être assez violent, à la manière d'un Novembre 1918. Pas celui du Grand Soir, cette fois ! Non, celui des classes moyennes. Celui des petits indépendants. Celui des trimeurs de l'ombre. Celui des doués de leur boulot. Ceux qui soignent le détail. Ceux qui, jour après jour, font vivre la Suisse. Pas derrière des pancartes. Mais dans l'inquiétude créatrice de leur atelier.
Pascal Décaillet