Sur le vif - Lundi 18.05.20 - 10.12h
Avec la complicité de Serge Dal Busco, et sans doute mercredi celle du Conseil d’État, l'idéologie Verte tente l'un de ces coups de force dont elle a le secret : donner un signal très clair d'extension du champ de la "mobilité douce", et de réduction de l'espace urbain pour les véhicules privés à moteur.
Cette idéologie, à la faveur de l'hystérie climatique de 2019, a gagné du terrain. C'était une année électorale : les Verts ont engrangé des bénéfices (c'était le but du tintamarre), les voilà avec quatre parlementaires fédéraux pour Genève, et depuis le 1er juin deux conseillers administratifs en Ville, détenteurs des leviers de pouvoir que sont les Finances et l'Aménagement.
Ils ont gagné du terrain, mais ne sont absolument pas majoritaires à Genève, ni en Suisse. Le problème, ce n'est pas eux. Ils participent à notre vie démocratique, et ont parfaitement le droit d'avoir leurs idées. A cela s'ajoutent des personnalités souvent compétentes et avec qui le débat est très agréable, respectueux, argumenté.
Non. Le problème, c'est les autres. Les Verts ayant grimpé vers les strates du pouvoir, dans lesquelles ils se sont toujours sentis fort bien, et représentant aujourd'hui l'idéologie à la mode (ce qui peut parfaitement se fracasser demain), on les associe aujourd'hui au pouvoir lui-même. Comme les radicaux vaudois des grandes années, ou les conservateurs valaisans, la simple évocation de leur nom évoque la puissance.
Les caractères faibles, peu sûrs d'eux-mêmes, n'ayant guère de valeurs propres, ni de vertus particulières pour l'esprit de résistance, aiment cela. Mimes, ils reproduisent. Moutons, ils suivent. Perroquets, ils répètent. Fidèles, ils disent la liturgie. Jusqu'à reprendre le jargon : transfert modal, transition énergétique, urgence climatique. Oui, s'il est une victoire de l'idéologie Verte, c'est bien d'avoir laissé transpirer leur sabir jusque dans les paroles des faibles, toujours là pour se mettre à la remorque.
C'est cela, l'enjeu du coup de force nocturne sur les pistes cyclables. L'affaire n'est en rien celle de l'opportunité de ces pistes (elles sont assurément nécessaires, pour la sécurité des cyclistes), ni de la largeur. L'enjeu réel, c'est le coup de force lui-même, longuement mûri, avec la complicité d'un ministre passé avec armes et bagages dans le camp de l'idéologie Verte. Pour laquelle il roule désormais ouvertement. Entre deux virées en décapotable.
Du Conseil d’État, il n'y a rien à attendre. L'idéologie Verte y est désormais majoritaire, avec trois ministres de gauche, un PDC ductile comme le vent qui tourne, un MCG polymorphe et aux mille ruses, un radical qui n'aime pas la voiture. Reste une inconnue sur la libérale. Mais une contre six, c'est un peu juste.
Reste le peuple. Les cyclistes s'organisent ? Eh bien pourquoi pas les utilisateurs de véhicules privés, automobiles ou deux-roues motorisés ! Pourquoi eux, qui sont nettement majoritaires, n'ont absolument pas à se sentir coupables, ni à se justifier de prendre leur véhicule, devraient-ils raser les murs, laisser l'idéologie Verte régenter les consciences, dicter le tempo, inventer les mots, se parler de la morale, prétendre incarner la vérité et l'avenir ?
C'est dans ce camp-là que se trouve la balle. Le camp de ceux qui travaillent, payent des impôts, des taxes, font vivre les autres. Le camp de la majorité silencieuse. Le camp de la révolte contre une idéologie qui veut tous nous placer sous sa férule. Le camp de la colère.
Pascal Décaillet