Sur le vif - Mardi 12.11.19 - 10.12h
Autant il est excellent que le PLR et l'UDC, à Genève, travaillent ensemble, et passent des accords électoraux, sur les plans cantonal et communal, autant il était, après tout, totalement justifié de partir séparément pour des élections nationales.
Ce qui unit le PLR et l'UDC, ce sont, par exemple, les questions financières et fiscales. Ou encore, la sécurité publique. Dans le Canton, la Commune, on peut œuvrer ensemble dans ces domaines.
Ce qui les désunit, c'est la question fondamentale, vitale même, de notre relation à l'Union européenne. Les bilatérales. Le libre-échange. Le protectionnisme. Les deux partis, sur ces thèmes cruciaux, poursuivent des objectifs radicalement différents. A la réflexion, il était en effet préférable qu'ils partissent séparément dans la course aux Chambres fédérales.
A cela s'ajoute un élément plus complexe, mais fondamental : l'impérieuse nécessité d'une clarification, au sein des sections romandes de l'UDC, de leurs positions face au libéralisme. Je suis, pour ma part, un conservateur anti-libéral, attaché à l’État social, à la proximité avec les gens, la défense des plus défavorisés. Mais d'autres, se réclamant de l'étiquette conservatrice, se laissent porter par le vent libéral, fréquentent les huiles, promeuvent le libre-échange et l'économie de casino. Entre ces deux tendances, antinomiques, il faut choisir.
Je l'ai déjà exprimé ici ces dernières semaines, appelant à la renaissance, en Suisse romande, d'un courant conservateur joyeux, simple, populaire, proche des petits entrepreneurs indépendants, des artisans, et surtout du monde paysan. Un courant souverainiste, attaché à la langue, aux textes, à la mémoire, portant ses attentions sur la cohésion sociale, la solidarité entre les Suisses, et non sur la recherche d'un profit spéculatif.
Il y a, en Suisse romande, une place pour ce courant. Mais pour cela, il faudra peut-être rompre avec le capitalisme zurichois. Les radicaux, en Suisse romande, ont déjà connu cette équation, dans le passé, par rapport à la Bahnhofstrasse, demandez à Guy-Olivier Segond. Il est peut-être temps que les sections romandes de l'UDC tranchent, à leur tour, le Nœud Gordien.
Pascal Décaillet
Commentaires
Le noeud gordien lie les fils suivants:
- un pour les radicaux: le mythe du progrès (qui a animé le XIXè siècle), qui s'essouffle aujourd'hui avec certaines prises de conscience sur les limites du monde,
- un pour les libéraux: le mythe de l'économie libérale (qui a animé la seconde moitié du XXè siècle), qui se dégonfle quand on se rend compte que la finance n'a rien de libéral (s'il faut l'Etat pour sauver les banques, et si le profit se fait sans responsabilité), et que les représentants des "patrons" sont, en fait, tous des salariés hyper-choyés,
- un pour les démocrates chrétiens: le mythe de la laïcité (qui a animé tout le XXè siècle), et qui a profité longtemps des conséquences de l'éducation religieuse des populations (sans devoir subir de discours moraux), mais on se rend compte que la morale publique baisse, et qu'il faut de plus en plus de règles contraignantes pour que des principes simples soient respectés (par exemple pour ces lamentables histoires de notes de frais, alors que le principe de l'honnêteté la plus plate voudrait qu'un employé s'abstienne de se rembourser ses frais, sauf s'il y est expressément autorisé - autrement, cela s'appelle "piquer dans la caisse"; ou alors sur les injures faites à telles ou telles catégories de personnes: il est interdit d'injurier qui que ce soit (et toute marque de mépris est déjà injurieuse), c'est déjà dans le code pénal; mais comme on a pris l'habitude d'injurier tout le monde sans appliquer le droit, on crée des catégories spéciales, ce qui va encore plus donner l'impression que ceux qui ne sont pas dans ces catégories spéciales peuvent se faire injurier),
- un très général, dans la foulée: le mythe de l'Etat de droit, qui est complètement dépassé; lobbyisme, clientélisme et activisme ont remplacé l'Etat de droit; les institutions ne jouent plus le rôle qu'elles sont censées jouer; des professeurs d'université, payés par l'impôt, soutiennent, aux lendemains d'élections fédérales, des activistes qui basent leur discours sur la violation du contrat social par le gouvernement, et valident ainsi les atteintes que subiront, notamment, des commerçants qui paient l'impôt; tout, à tous les échelons, va de travers;
- et un fil pour les lier tous, le pacte des idoles, pour diaboliser et museler ceux qui s'opposent à l'individualisme (idole régnante) et bénir, comme étant le camp du bien, ceux qui ont le "courage" de s'opposer au nationalisme, dangereuse idole aujourd'hui déchue.
Les petites techniques d'alliances ne suffiront pas. Face à l'essoufflement des mensonges qui ont porté la modernité, nous sommes dans un moment de basculement comme on en connaît, au plus, deux fois par millénaire.
M. Baeriswyl a écrit :
...Les petites techniques d'alliances ne suffiront pas. Face à l'essoufflement des mensonges qui ont porté la modernité, nous sommes dans un moment de basculement comme on en connaît, au plus, deux par millénaire...
Tout son texte est une excellente tentative de faire un bilan argumenté de notre ère agitée. Un tel constat d'instabilité menaçante mériterait une attention soutenue de la part des décideurs politiques tout à la joie de leurs dernières victoires électorales. L'incroyable faiblesse des scores de participation fait apparaître la faille dans laquelle tout le système pourrait abruptement basculer : la disparition de la confiance.
Tant la droite avec un usage immodéré et frelaté des termes de respect et de responsabilité, que la gauche avec cet informe vivre-ensemble, se doivent de repenser leur vision du monde qu'ils désirent transformer, et transmettre ensuite clairement cette vision aux citoyennes et citoyens.
S'ils ne désirent que le gérer, ce monde, notre monde, alors qu'ils aillent au diable. Celui-ci est prêt pour le grand toboggan.
Vous êtes pour l'Etat social. Ca tombe bien , moi aussi. Donc, on ne baisse pas la fiscalité!, obsession compulsive de l'UDC!