Sur le vif - Mardi 11.06.19 - 11.29h
Rive droite bloquée, ce matin, quartier Nations, avec un nombre impressionnant de policiers, carrefours bloqués, motos avec sirènes. Hier, c'était même un incessant ballet d'hélicos.Tout cela, pour le centenaire d'une Organisation internationale qui envisage de placer notre pays sur liste noire ! Sommet de masochisme, de la part de la gentille Suisse. Et la gentille Genève, toujours prompte à jouir des verges du multilatéralisme, par elle-même administrées.
Il y a cinquante ans et un jour, le 10 juin 1969, je la respectais profondément, cette même Organisation. C'était la visite du Pape Paul VI à Genève. Première du genre depuis la Réforme. Journée entière, avec ma mère, consacrée à l'événement. Guetté le Pontife à l'entrée du BIT, en fin de matinée. Puis, l'après-midi, la grand-messe en plein air, au Parc La Grange. Journée magnifique, joyeuse. Le père d'un de mes camarades de classe, haut dignitaire du Dahomey (aujourd'hui Bénin), était vice-directeur du BIT, c'est lui qui avait reçu le Pape. Nous étions aux premières loges.
A dix jours de mes onze ans, je finissais l'école primaire, m'apprêtais à un sublime voyage en Andalousie, respirais cette journée bleutée de juin comme la promesse d'un monde ouvert et fraternel.
Plus tard, j'ai étudié le rôle éminent du BIT, sous l'impulsion d'Albert Thomas et de ses successeurs, dans les législations internationales sur le travail. Organisation respectable, oui !
Mais aujourd'hui ? Une pieuvre multilatérale, trois immenses avions russes à Cointrin (je viens de les voir), le ballet des Grands, qui dominent tout, le Tiers-Monde oublié, les Non-Alignés qui ne sont plus qu'un souvenir. Et ils se proposent de mettre la Suisse sur liste noire ! Et on les reçoit, comme des grands ! En priorité absolue. Sirènes. Flics, partout. Obédience, courbettes et révérences. Etat de siège. La Genève internationale est passée de l'apparence de la grâce à la réalité de la pesanteur.
Il y en a, paraît-il, pour dix jours. Et sur notre dos.
Pascal Décaillet