Sur le vif - Jeudi 16.01.14 - 17.40h
Un sondage Gfs-SSR dont la légendaire crédibilité ne nous arrachera, tout au mieux, qu’un sardonique éclat de rire. Un matraquage hallucinant des milieux patronaux, que bizarrement dans notre pays on appelle « les milieux de l’économie », comme si un ouvrier, une caissière, un paysan de montagne, un petit indépendant ne participaient pas pleinement, eux aussi, à notre économie nationale. Des dizaines de millions jetés dans la campagne du non. Un président de la Confédération ayant annoncé dès le 1er janvier qu’il serait le commis-voyageur en chef des opposants, menant la charge tambour battant, Matinales par ci, Infrarouge par-là, et ayant de surcroît le culot de déclarer qu’il ne faisait pas campagne. On pensait que tout cela suffirait à définir la machine de guerre du non à l’initiative « contre l’immigration de masse », sur laquelle nous votons le 9 février.
Eh bien non. Cela ne suffisait pas. Il aura encore fallu qu’hier, un Conseil fédéral bien nerveux vînt nous fourguer in extremis, à trois semaines du verdict du peuple et des cantons, des mesures d’accompagnement qu’il aurait dû nous annoncer depuis des années, si la dérive néo-libérale et la sanctification de la libre circulation absolue, conçue comme un dogme, ne l’avaient à ce point, et depuis si longtemps, aveuglé.
Depuis le départ de Jean-Pascal Delamuraz (1998), le dernier grand radical, le dernier de cette famille qui fût de tempérament à se soucier en priorité de l’intérêt supérieur de l’Etat, des petites gens, de notre cohésion sociale et nationale, oui le dernier radical qui ne fût point en génuflexion devant les forces de l’Argent, le Conseil fédéral donne l’impression de n’agir qu’au service d’une économie mondialisée, où la spéculation de quelques-uns, hélas, l’emporte sur l’intérêt de tous.
On nous dit que la libre circulation, depuis dix ans, est un facteur de croissance. Admettons-le. Mais qui, en priorité, dans ce pays, en a profité ? Ces 80'000 nouveaux migrants par an, qui ont-ils, avant tout, enrichi ? Voter oui le 9 février, ça n’est en aucun cas fermer la porte à l’immigration. Encore moins, déconsidérer l’étranger dans une démarche de nature xénophobe. C’est juste instaurer, au service de tous, un minimum de régulation pour éviter, un jour, l’explosion par le surplus. J’ignore absolument quel résultat obtiendra l’initiative le 9 février. J’ignore si elle passera. Mais une chose est sûre : quel que soit le résultat, la Suisse devra empoigner, dans les années qui viennent, la question migratoire. Si ce n’est par des contingents (la solution de l’UDC), cela pourrait être par une typologie plus sévère des choix d’accueil, en fonction des besoins sur le marché du travail.
« Il ne suffit pas de voter non », titrait récemment un éditorialiste à Genève. Je suis bien d’accord avec lui : on pourrait parfaitement, par exemple, pousser le souci de l’intérêt supérieur de notre population résidente jusqu’à voter oui.
Pascal Décaillet