Sur le vif - Lundi 14.06.10 - 17.28h
Elle aura été laborieuse, la succession d’Anne Bisang à la tête de la Comédie, à Genève, elle aura fait couler de l’encre, de la salive, fait sortir Charles Beer de sa réserve, mais toutes ces difficultés, devant l’excellence du résultat, s’évanouissent. C’est Hervé Loichemol qui sort du lot, fou de théâtre et de littérature, allumé des planches, provocateur dans la Cité.
Depuis le premier spectacle que j’ai vu de lui, « Rester Partir » de Bernard Chartreux en 1984, c’est toujours avec un pincement de désir et de folle curiosité que je vais voir ses pièces. Il y a Yves Laplace, son complice de toujours, avec lequel il monta, en 1989, l’éblouissante « Nationalité française » (sur fond d’Algérie française, dans laquelle Loichemol a grandi). Il y a Heiner Müller (Hamlet-Machine, Quartett), il y a le Koltès de la "Solitude des Champs de coton", il y a Brecht, Sade, Olivier Py, Michel Beretti, et une impressionnante quantité d’auteurs contemporains.
Avec Loichemol, le théâtre est dans la cité, il nous interpelle, nous remet en question, nous heurte, nous dérange. Surtout, il nous jette des horizons, sur le chemin. Il ouvre le jeu. On l’aimera ou non, on l’encensera, on le conspuera, il ne laissera jamais indifférent. Là où certains se contentent de passer les murailles, en voilà un qui existe, haut et fort. A prendre ou à laisser. Essayez de prendre : ça vaut la peine.
Pascal Décaillet