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Betticher, homme d'honneur



Édito Lausanne FM – Jeudi 06.12.07 – 07.50h



Nicolas Betticher. C’est vrai, l’homme est élégant, très soigné, le sombre de ses costumes, serrant une taille fine, lui donnait déjà des allures de ministre, avant même le ministère. Betticher, un sourire, une tenue, une culture, une intelligence. Donc, évidemment, autour de lui, et jusqu’aux confins du Rhône et de la Saône, des tonnes de jalousie.

Nicolas Betticher, chancelier de l’Evêché de Lausanne, Genève et Fribourg, ordonné prêtre, dimanche dernier, en grande, et peut-être trop grande pompe, en la Cathédrale Saint-Nicolas de Fribourg, par son patron direct Monseigneur Genoud, en présence de 120 prêtres et 3 évêques, bref une sorte de couronnement impérial peint par David. Betticher, c’est l’homme-clef du diocèse.

C’est vrai, j’en conviens, autour de Mgr Genoud, rien ne se fait sans Nicolas Betticher. Il est un peu le Jacques Attali de l’évêque. Il était longtemps civil, et voilà que, sur le tard, il a décidé d’entrer dans les ordres. Lui, cette intime et irrévocable décision, il l’a prise au milieu de la quarantaine. L’un de mes magnifiques amis, aujourd’hui supérieur chez les Frères de Saint-Jean, l’avait prise l’année de ses cinquante ans. Betticher avait déjà fait toutes les études, et même bien au-delà, pour devenir prêtre, sauf le séminaire, dont Mgr Genoud l’a dispensé. Puisque déjà, il y enseigne. Disons qu’il a bénéficié, pour accéder au sacerdoce, d’une formation accélérée. C’est l’un des griefs – le plus doux, le plus mesuré – de la revue Golias.

Golias, dirigée par Christian Terras. C’est une revue catholique de gauche, à Lyon. Une revue qui adore s’en prendre à l’institution ecclésiale, ce qu’elle fait parfois avec bonheur, souvent avec excès. Surtout, cette revue, si confortable pour les ennemis du catholicisme, est immédiatement et systématiquement reprise, citée tous azimuts et avec jouissance par la presse, à chaque papier marketing et provocateur qu’elle commet.

En l’occurrence, c’est la revue Golias qui pose problème. Assassiner froidement l’ensemble d’un diocèse, démolir l’évêque, salir l’honneur et la réputation d’un chancelier en effet très puissant, faire courir des bruits, il y a là, sous couvert de liberté journalistique, des procédés qui donnent à réfléchir. Non qu’un diocèse soit inattaquable, loin de là, tout doit pouvoir être dit. Mais lorsque la plume parée de vérité porte en elle l’encre de la vengeance, suite à des affaires très précises, un licenciement par exemple, il convient peut-être d’en relativiser le message.

Nicolas Betticher est un homme puissant. Il est sans doute, aussi, un homme ambitieux, et pourquoi pas un Rastignac, dans toute la provinciale acception – et le charme bourgeois - de ce terme balzacien. Tout cela, oui. Mais sans lui, sans son immense travail, sans la qualité de son intelligence, sans ses réseaux, l’Evêché de Lausanne, Genève et Fribourg ne serait tout simplement pas ce qu’il est. Avec l’excellence de sa formation intellectuelle, Betticher aurait pu, en se lançant dans des activités profanes ou commerciales, devenir l’un des puissants parmi les puissants, bien au-delà de ce qu’il est. Au lieu de cela, il a donné toute sa vie à un diocèse. Il existe, dans le monde des Rastignacs, des projets plus lucratifs.

Nicolas Betticher est aussi, je le sais, un homme d’honneur. Ce trajet qui, à 46 ans, après une riche carrière, l’a conduit à choisir la voie de l’ordination sacerdotale, qui d’entre nous peut le juger ? Ce chemin intérieur, qui d’autre que lui en entrevoit les vrais contours ? Et sous la pompe, et le lustre, de la cérémonie de dimanche dernier, ces titres de chancelier, ou d’official, s’il y avait, simplement, la fragilité d’un homme face à sa foi ?

Un homme d’honneur, oui. On peut comprendre que la salissure le blesse. Puisse-t-il affronter cette épreuve avec la sérénité qui s’impose. Pour ma part, je lui dis mon admiration et ma confiance.

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