Et puis, quoi, "éviter au maximum" les EMS ? Mais bordel, les pensionnaires, ce sont avant tout des gens de leur génération qui viennent leur rendre visite. Leurs vieux amis. Ceux de leur âge, qui ont grandi avec eux, fréquenté les mêmes écoles, ceux qui se sont naguère aimés, qui furent amants, jaloux, réconciliés, ceux qui avec eux ont vu le monde changer, contemporains, comme le décrit si bien Annie Ernaux, dans "Les Années".
Alors non, il faudrait que les vieux aient la délicatesse d'éviter de fréquenter d'autres vieux. Il faudrait qu'ils aient la sagesse de demeurer chez eux, raser les murs en faisant leurs courses, en dehors des heures de pointe, surtout n'approcher personne, ne saluer personne.
Saloperies de directives. L'hygiène, oui. La discipline collective, oui. Les précautions d'usage, oui. Mais pousser le bouchon, dans un communiqué qui eût faire rougir le Camus de la Peste, jusqu'à ostraciser de la Cité la personne âgée, déjà scandaleusement mise à l'écart par notre société de profit, là il faut réagir ! Et les courageux, qui ont édicté ces directives, ils n'ont pas, eux, la plus élémentaire des hygiènes : celle de signer.
La précaution, oui. La mise à l'écart, froide et sans âme, de toute une catégorie de population, c'est NON, NON, et NON !
Pascal Décaillet