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Coronavirus : notre immense fragilité d'humains

 

Commentaire publié dans GHI - Mercredi 04.03.20

 

Nous voilà donc confrontés à une épidémie. Qui d’entre nous, il y a seulement quelques semaines, aurait été capable de le prévoir ? Nous n’avons rien vu venir, juste pensé un moment que le mal se cantonnerait à la Chine. Et là, il est chez nous. Les proportions, à l’heure où j’écris ces lignes, sont encore modestes dans notre pays. Les autorités ont pris des mesures, dont certaines spectaculaires, chacun jugera. Notre pensée première va aux victimes. Celles d’ici, celles d’ailleurs : un humain est un humain, chacun à mes yeux en vaut un autre. Et la mort chinoise, si lointaine pour nous, vient faucher les existences, endeuiller les humains, tout comme la mort d’ici.

 

Notre deuxième pensée, en importance et en chronologie, doit se diriger vers toutes les personnes, à Genève et ailleurs, qui vont souffrir économiquement des décisions annoncées par le conseiller fédéral Alain Berset. On aime ou non le Salon de l’Auto, je ne m’y suis pour ma part plus rendu depuis au moins quarante ans, mais une chose est sûre : cette manifestation entraîne d’inestimables retombées pour l’économie genevoise, hôtellerie, restauration, sous-traitants, petits boulots pour étudiants, etc. Le manque à gagner sera considérable. A ces habitants de notre canton, qui vont beaucoup perdre à cause d’une mesure de prévention, nous devons dire notre solidarité. Et sans doute les autorités cantonales devront-elles imaginer un mécanisme de compensation.

 

Pour le reste, la crise que nous traversons amène chacun d’entre nous à se poser l’une des questions les plus fondamentales pour un humain : son rapport à l’autre. Déjà, on nous invite à éviter les foules. Pas trop de mains serrées, encore moins d’accolades, de l’hygiène, de la retenue. Là encore, chacun jugera. Mais cet appel à la distance ne manquera pas d’avoir des conséquences sur le rapport que toute personne, dans notre communauté humaine, entretient avec l’altérité. La Chine, provenance réputée du mal en question, n’est-ce pas l’autre par excellence, le lointain, le dissemblable ? Le malade, le contaminé, doit-il cesser d’être notre frère, notre sœur, sous prétexte qu’à son corps défendant, il véhiculerait le mal ?

 

A vrai dire, le coronavirus nous brandit un miroir : celui de notre immense fragilité d’humains. Jetés là, sur cette terre, entre naissance et mort, dans les aléas d’une existence dont nous ne maîtrisons pas grand-chose. Un soir, la foule sentimentale, innombrable et magique. Au matin du lendemain, on nous invite au confinement, peut-être à la solitude. Qui croire ? Et la sagesse, d’où viendrait-elle ? Des illuminations de l’ermite, ou des chaînes de transmission, entre les humains ? Et la joie, celle de cet inoubliable choral de Bach, cette joie appelée à « demeurer », d’où peut-elle surgir, si ce n’est d’une profonde acceptation de l’Autre ?

 

Si cette crise épidémiologique pouvait, peut-être, susciter en chacun de nous l’une ou l’autre réflexion, on constaterait assez vite que le personnage principal, le seul qui vaille, n’est pas le virus. Mais l’être humain, sur la terre.

 

Pascal Décaillet

 

 

 

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