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Notre Dame des Congestions

 

Sur le vif - Dimanche 15.07.12 - 10.22h

 

Notre Dame, depuis les pires heures du Kulturkampf, n'avait plus vu un tel bordel. Dans un quartier éternellement raté (les clichés du milieu du dix-neuvième siècle, avec cette gare à se pendre, au milieu de rien, le montrent déjà), Sainte Michèle et Sait Rémy ont décidé de faire très fort. À quelles fins ? Mais l'expiation, pardi ! Celle du cochon d'automobiliste, habité par la porcine folie de s'imaginer qu'une artère a pour vocation de permettre à un véhicule de se mouvoir d'un point A à un point B. La pauvre âme. Ignorait-elle qu'elle n'était là, l'artère, que pour l'équarrissage ?

 

Imaginons une famille de touristes espagnols, de passage. Ils nous ont fait l'amitié de venir visiter notre ville. Hier, samedi 14 juillet, jour de trémoussements sur les quais et d'ouverture de chantier, place des 22 Cantons. Ils sont en voiture, ce qui, au pays de Torquemada et Picasso, ne constitue pas encore un crime de sang. Eh bien, sur le coup de 20 heures, pour se mouvoir de la place du Cirque à Cornavin, ils ont bien dû mettre trois quarts d'heure. Pas sûr que ça les encourage à revenir nous dire bonjour.

 

Et ça n'est que l'apéritif, le prénom. Sur cet axe, nous allons tous trinquer. Comme à Bel-Air ! Comme partout. Que des travaux, donc des aménagements, des déviations, soient nécessaires, n'importe quel esprit citoyen et responsable en convient. Mais cette impéritie. Cette absence de toute information, en amont, ne serait-ce qu'aux entrées de la ville, comme le font si  bien les Français, sur leurs écrans d'autoroutes. Cette carence totale de vision coordonnée, avec une véritable mise en place de panneaux de déviation. Non, le cochon d'automobiliste est condamné à vivre en silence l'immobilité de son destin. Pire : les feux ne sont même pas mis au clignotant. Et le cochon, tellement brave et discipliné, surajoute au statisme en les respectant.

 

Et on va tous trinquer, pour la bonne raison qu'emmerder au maximum l'automobiliste est voulu d'en haut. C'est une politique. Voulue, assumée, planifiée, mise en œuvre. Par une Direction générale de l'Immobilité, elle-même aux ordres de beaux esprits considérant la voiture automobile comme l'incarnation du Mal. « Ils veulent prendre leur bagnole en ville, eh bien ils vont voir ce qu'ils vont voir ! ». Qu'un article de la Constitution, adopté par le peuple souverain, reconnaisse le libre choix du mode de transport, les laisse totalement indifférents. Ils sont mus par une idéologie. Raide, pétrifiée. Ils n'y dérogeront pas. Nous trinquerons. Et Notre Dame des Congestions pourra contempler, longtemps encore, la sainte éternité de l'immobilité.

 

Pascal Décaillet

 

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