Sur le vif - Dimanche 03.06.12 - 15.11h
« Camp d'internement ». Ils ont osé utiliser ce mot. Les « camps d'internement light » ne suffisent pas, a renchéri Toni Brunner. Il faut donc en conclure que le président de l'UDC suisse souhaite, pour les requérants « récalcitrants », des camps d'internement lourds. Le contraire de light. Comme il y a Coca light et vrai Coca.
Alors, voilà, on peut discuter de tout. On doit, même. L'explosion des demandes d'asile en Suisse, les cas de faux requérants, ceux qui commettent des délits et des crimes, oui, tout cela est un vrai thème. Il n'est pas question de l'oblitérer.
Mais en politique, les thèmes sont portés pas des mots. Celui de « camp d'internement » ne passe tout simplement pas. Trop chargé d'Histoire, M. Brunner. On peut discuter de tout, y compris de votre idée de camp central, national. Pour ma part, je la combattrais, mais enfin on peut en parler. Mais « camp d'internement », non.
Les partisans de M. Brunner me diront que je chipote. Non. Les mots, en politique, ne sont pas seulement vecteurs de pensée. Il arrive qu'ils la précèdent. La dominent. La guident vers des chemins de brume qu'elle n'aurait pas souhaités. Et là, M. Brunner, « camp d'internement », outre que j'en rejette le concept, j'en vomis simplement les syllabes. Parce qu'elles charrient, je l'espère en tout cas pour vous, et pour nous tous, autre chose que votre projet. Un autre arrière-pays, pas si lointain.
Je remercie les partisans de M. Brunner, dans leurs commentaires, d'éviter de me ramener le grief de « reductio as Hitlerum », même s'ils le pensent, c'est juste pour s'éviter un nouveau débat sans fin, comme après l'histoire de l'UDC genevoise et de sa demande de dissolution de Mesemrom.
Je note simplement que ce grand parti, le premier de Suisse, qui aurait pu être le pivot d'une reconstruction des droites dans notre pays, ne semble, de son plus haut niveau, pas en avoir envie. Comme si pour écrire le texte, la page étant offerte, et laissée en jachère par l'inexistence des droites traditionnelles, on demeurait, inamovibles, dans la boue de la marge.
Pascal Décaillet