Sur le vif - Dimanche 04.03.12 - 10.22h
L'élection complémentaire du 17 juin prochain présente un grand avantage, mais aussi hélas un énorme danger, dans la vie politique genevoise.
L'avantage, c'est la qualité des personnes en lice. Pierre Maudet est l'un de nos meilleurs politiciens, non seulement à Genève mais en Suisse. Eric Stauffer aura une occasion de tester, grandeur nature, l'évolution de l'adhésion de la population à ses thèses. Quant aux socialistes, s'ils ne se trompent pas de candidat, ils ont de très grandes chances de récupérer leur deuxième siège. D'autres, dans les jours qui viennent, pourraient s'annoncer.
Nous sommes exactement dans le cas de figure idéal d'une complémentaire : place à des personnalités fortes. Souris grises, s'abstenir. La République ne peut qu'en sortir gagnante, et ce nouveau conseiller d'Etat, même pour seulement seize mois, sera de nature à revitaliser un gouvernement en bout de course.
J'en viens au danger. Après avoir vécu un hiver de mort politique, tellement sont tombés bas les arguments, tellement fut douloureuse, et pitoyable, la lente et inexorable exécution d'un magistrat qui n'avait en aucun cas mérité cette issue, nous allons, c'est sûr, vers un très beau printemps : présidentielles françaises, puis législatives, complémentaire à Genève. L'occasion d'aimer la politique, le combat d'idées. Mais imaginer une seule seconde que le remplacement, cet été, d'un seul septième du gouvernement actuel, en abolira les carences structurelles, c'est se voiler la face. Genève n'a pas de Conseil d'Etat, elle a juste sept (enfin six, maintenant) personnes, dont certaines de qualité, jetées là, sans épine dorsale, sans cohérence, sans réels objectifs communs.
C'est cela qu'il faut changer. Et je ne suis pas sûr du tout que la Constituante prenne la mesure des réformes nécessaires, au-delà du cosmétique. Il ne s'agit pas de gouvernements monocolores. Non. Il s'agit d'opposer, non plus des personnes disparates, mais des listes les unes contre les autres. Des projets politiques ! Pour chaque liste, un objectif de législature (et non dix-huit), la ligne claire, la lisibilité d'une dominante. Et lorsque tout part en quenouilles, ça n'est pas un septième qui saute, comme un fusible. Mais les sept. Et le souverain redistribue les cartes. Alors qu'aujourd'hui, nous avons six survivants, tout heureux d'être encore de ce monde, et un sacrifié. Une manœuvre dont personne n'est dupe. Et le crédit du politique, chaque fois, qui s'effondre un peu plus.
Pascal Décaillet