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Il n'y a pas d'affaire Mark Muller

 

Sur le vif - Samedi 14.01.12 - 11.00h

 

Madame Rochat a décidément beaucoup de chance. Non seulement une coagulation de pouvoir allant jusqu'aux Verts la protège (parce qu'il en va, tout simplement, de la survie de cette coalition même). Non seulement les députés de l'Entente (élargie aux Verts), les mêmes qui se montrent les plus féroces, à son égard, en privé, l'épargnent lorsqu'ils s'expriment au grand jour. Mais voilà qu'en ce début d'année, deux autres conseillers d'Etat servent de dérivatif et de diversion à la très mauvaise gestion politique de la police : Madame Künzler, pour cause de TPG, et surtout, depuis hier soir, Mark Muller, catcheur nocturne. Du coup, on parlera beaucoup moins des carences de Madame Rochat. Et l'ordre continuera de régner sur Genève. Quel ordre ? Celui de l'équipe au pouvoir. Élargie aux Verts.

 

Eh bien pour ma part, je refuse de jouer ce jeu. Nous devons juger les politiques, à commencer par les ministres, sur leurs actes publics, en aucun cas sur leur vie privée. Qu'on attaque Mark Muller sur la lenteur de ses dossiers, le plan directeur cantonal, aucun problème. Mais une bagarre, dans une boîte, la nuit du réveillon, cela concerne Mark Muller et le barman. Pas la République. Dans sa vie privée, le conseiller d'Etat a le droit d'aller où il veut, être amoureux de qui il veut, s'échauffer face à qui il veut, s'il estime son honneur - ou celui d'une amie - en cause. Il aura peut-être à en répondre, parce que les bagarres, pas plus que les duels, ne demeurent impunies. Mais même s'il devait être désavoué, cela n'aurait strictement rien à voir avec son activité publique. Il n'y a pas d'affaire Mark Muller.

 

En revanche, il y a bel et bien une affaire Rochat. Oh, sur le plan privé, j'en témoigne, la plus aimable des personnes. Mais, désolé, une ministre qui a échoué. L'autorité de l'Etat, face à la police, ne s'est pas imposée. La communication : catastrophique. Pire : la conseillère d'Etat, publiquement, charge ses subordonnés, à commencer par une cheffe de la police qui fait remarquablement son travail, serre les dents face aux admonestations de sa magistrate, jouit de la confiance de sa base, comme le relève l'excellente enquête de Fabiano Citroni, dans la Tribune de Genève de ce matin.

 

Mais las ! Il faut sauver le soldat Rochat. À tout prix. Pourquoi ? Parce qu'elle est le maillon faible du gouvernement. Au-delà, le maillon faible de la coalition d'intérêts (élargie aux Verts) citée plus haut, entendez l'actuelle majorité de pouvoir à Genève. Celle qui se partage postes et prébendes ! Si ce maillon-là devait céder, c'est cette majorité, au demeurant protéiforme, hasardeuse, sans épine dorsale idéologique, juste là par communauté d'intérêts, qui volerait en éclats. Et c'est exactement pour cela que les députés de cette coalition, oui les mêmes qui pestent dans le privé, se la coincent en public. N'en soyons, simplement, pas dupes.

 

Au fait, je suis si distrait : ai-je songé à rappeler que cette coalition de pouvoir, d'intérêts, de partage des postes, pouvait, de plus en plus, se féliciter de la très étroite collaboration des Verts ?

 

Pascal Décaillet

 

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