Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Cabaret d'Etat

 

Sur le vif - Dimanche 26.06.11 - 16.02h

 

« Cabaret d'Etat » : c'est vif, bien décoché, ça cingle comme du Couchepin ; c'était, ce matin, la vanne de Micheline Calmy-Rey à l'équipe de la Soupe. L'oxymore, c'est sûr, devait être préparé de longue date. Il a fait mouche.

 

J'ai aimé Micheline Calmy-Rey dans cette émission, parce qu'elle a fait exactement le contraire de tous les autres, tous ceux qui font semblant de bien prendre les flèches incendiaires, se jurent de ne surtout pas s'énerver, rester cool, et, hélas, y parviennent. Ceux-là, tout fiers d'arborer l'helvétique qualité de celui que rien ne démonte, ne brillent en fait que par une hypocrisie qui ne trompe personne.

 

Ce matin, Micheline Calmy-Rey a eu raison de rester elle-même. Celle qui n'a pas trop d'humour, le reconnaît, montre sa susceptibilité, avoue être facilement blessée, bref la réalité d'au moins trois humains normalement constitués sur quatre, le quatrième étant une sorte de héros sulpicien, aux confins du masochisme et du martyre, lesquels ne sont d'ailleurs, depuis le supplice de Saint Sébastien, pas incompatibles.

 

Bien sûr que l'humour blesse. Bien sûr qu'il dérange. Bien sûr qu'il fait mal. C'est très bien ainsi : qu'il continue. Mais je ne vois vraiment pas pourquoi, sous prétexte que les bourreaux arborent l'étiquette de cabarettistes (d'Etat !), il faudrait faire le dos rond, et ne pas montrer la moindre faille de souffrance.

 

Quant au « cabaret d'Etat », il nous amène à une réflexion bien au-delà de la Soupe. Lorsque des bandes d'humoristes étrillent, équarrissent, éviscèrent, il faut se poser la question de leur part de risque. A la Soupe, cabaret d'Etat, risque zéro. Dans la page hebdomadaire, dite d'humour, de certains quotidiens bien obédients le reste de la semaine, risque zéro. Lorsque Stéphane Guillon pourfendait avec génie un DSK encore déifié, là le risque était un peu plus grand. Le jour où les courageux de la 25ème heure s'attaqueront à leurs patrons, leurs proches, leurs groupes de presse, les administrateurs et les actionnaires de ceux qui les nourrissent, là nous commencerons à parler de risque.

 

Mais l'humoriste en pantoufles, l'humoriste salarié, celui qui jamais ne se fait virer, persuadé d'être un héros, dans la Suisse de 2011, parce qu'il vilipende le Pape, ou Blocher, ou Kadhafi, ou Ben Ali, ou Moubarak, celui-là, à moins d'être extraordinairement drôle, ne mérite guère plus d'attention que les ronds-de-cuir d'un fonctionnaire, dans quelque tragi-comédie de Pirandello, lorsqu'il se lustre les manches, au moment de la pause.

 

Pascal Décaillet

 

 

 

Les commentaires sont fermés.