Chronique publiée dans la Tribune de Genève - Lundi 22.03.10
On le disait totalement isolé, on annonçait qu’il n’aurait qu’une seule voix : la sienne. On le disait un peu fou, inaudible, tout juste bon pour le décodeur. Et voilà qu’au Lignon, face à René Longet, Alberto Velasco a ramassé un tiers des voix. Un score extraordinaire, quand on pense aux pressions internes qu’il a subies, à la chansonnette des apparatchiks qui lui ordonnaient de se retirer.
Ce tiers, conquis de haute lutte par Velasco, c’est le Tiers Etat. La sourde rumeur contre le jeu des marquis et roitelets qui se partagent postes et prébendes, régales et gabelles. Si la suprême cléricature du parti a fini par réélire René Longet, c’est par annulation des forces, neutralisation des ambitions. Je te tiens, tu me tiens, et la somme de nos barbichettes égale zéro.
Alors, quel avenir pour Velasco ? Continuer d’attaquer des moulins ? Passer chez un logopédiste ? Ou plutôt, tiens pourquoi pas, partir de ce tiers du Lignon pour suivre son étoile. Sur ce chemin-là, il pourrait bien se trouver beaucoup moins seul que prévu. Parce que l’obscurité de son verbe est parfois plus éclairante que dix mille langues de bois. Il en jaillit quelque chose de gauche et de maladroit, remuant, dérangeant. Quelque chose d’assez rare, au fond, de l’ordre de l’irruption ou de l’inopiné. Cela s’appelle, simplement, la sincérité.
Pascal Décaillet