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  • La lucidité, camarade, pas la morale !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 21.08.24

     

    Notre époque est obsédée par la morale, et c’est un tort immense. Partout, des textes qui prônent le bien contre le mal, la mesure la plus extrême dans l’usage des mots. Surtout, ne blesser personne, aucune communauté, aucune corporation de mémoire victimaire. Si vous êtes élu, votre vie privée doit être impeccable, ce qui est non seulement hors-sujet (on doit juger un politique à ses seuls résultats), mais de récente importation américaine, comme si nous devions subir, nous Européens, les effets d’un puritanisme qui n’est pas dans nos traditions. De retour du Nord de l’Allemagne, je suis allé en 2019 dans la Frise, tout au Nord des Pays-Bas, dans ces villages pauvres, d’une austérité magnifique, derrière les digues. J’ai visité les cimetières marins. C’est de là qu’est parti, il y a plusieurs siècles, l’exigence puritaine qui a marqué le Nouveau Monde. Et bien le voilà de retour sur notre continent, cet impératif d’ascèse et de morale publique. Il faut savoir d’où viennent les choses, les identifier, les nommer, les placer dans un contexte historique : la lucidité, SVP, pas la morale !

     

    Il y a, dans le jugement moral, le danger de l’anachronisme (confondre les périodes, sans souci de l’Histoire ni du contexte propre à chaque époque), ainsi, disons-le franchement, qu’une lamentable inculture. Le bien, le mal, sont des notions philosophiques, théologiques, que sais-je, elles ne sauraient nourrir la réflexion historique, qui exige avant tout de capter le réel au plus près, dans son infinie diversité, en tenant compte de toutes les positions antagonistes d’une époque, d’un conflit, en puisant dans les sources les plus contradictoires. En tentant l’aventure, toujours fragile, toujours corrigible, d’une synthèse personnelle. C’est cela, la démarche de lucidité : elle se tisse de curiosité, de connaissance, de confrontation des perspectives. Elle rejette tout absolu, toute idée définitive. Elle exige un esprit ouvert. A des milliers de lieues marines des butés de la morale, et du jugement anachronique, avec les seuls critères d’aujourd’hui. Ces gens-là sont des ploucs, il faut le leur dire, et les traiter comme tels.

     

    Ami lecteur, je t’invite à la connaissance. Tu t’intéresses à l’Ukraine, à la Russie ? Tu as bien raison, c’est une très longue Histoire, passionnante, plusieurs fois séculaire : eh bien, renseigne-toi, lis des livres, découvre ce mouvement de balancier qui a traversé l’Histoire. Idem pour le Proche-Orient. Idem pour les rapports entre l’Allemagne et la Pologne. Les livres existent, les témoignages, les archives : active la toile dans ce qu’elle propose de meilleur, renseigne-toi, laisse toutes les variantes, toutes les versions, s’installer dans ta conscience. Et, doucement, au fil des années, laisse en toi se dessiner une synthèse, jamais définitive, toujours retouchée par les derniers témoignages. La démarche historique, c’est le contraire même du propos de bar, ou de bistrot, ou de TV privée parisienne. La lucidité, camarade, pas la morale !

     

    Pascal Décaillet

     

  • Immigration : bravo, Gerhard Pfister !

     
    Sur le vif - Mardi 20.08.24 - 15.47h
     
     
    Malgré le OUI du peuple et des cantons, le 9 février 2014, à l'initiative contre l'immigration de masse, la Suisse n'a rien entrepris pour mettre en oeuvre la volonté politique du souverain. Le Parlement a scandaleusement dévoyé l'esprit du texte voté, il l'a vidé de sa substance, il s'est montré indigne du peuple suisse. Plus de dix ans après le vote, en août 2024, notre pays subit, plus que jamais, une pression migratoire qu'il avait pourtant décidé, non d'arrêter, mais de réguler.
     
    Mais les esprits, dans toute la Suisse, bien au-delà de la seule UDC, ne cessent d'évoluer sur la question migratoire. Au fil des années, irrésistiblement, le curseur se déplace, les langues se délient, de plus en plus de nos compatriotes, sans pour autant verser dans la moindre xénophobie, osent avouer que l'immigration constitue pour eux le problème no 1. Non en tant que telle, mais l'intensité de la pression. En clair, la masse numérique. Personne ne parle de stopper l'immigration. Mais une majorité de gens parlent de la RÉGULER : c'est si difficile à comprendre ?
     
    Dernier rebondissement en date : l'homme qui veut cette régulation n'est ni UDC, ni même de l'aile conservatrice du PLR. Non, c'est Gerhard Pfister, le Président du Centre suisse ! Qu'a-t-il commis, l'infâme ? Réponse : il vient de proposer un contre-projet (ce qu'un Conseil fédéral inconscient se refuse à faire) à l'initiative UDC contre une Suisse à dix millions d'habitants. En clair, il entre en matière, et envisage un texte certes moins radical que celui de l'UDC, mais reconnaissant la pertinence de la question posée.
     
    M. Pfister a mille fois raison. Homme d'instinct autant que d'intelligence, il perçoit le ras-le-bol de la population. La libre circulation est peut-être une avancée économique (et encore, ses bienfaits sont si mal répartis !), mais elle est une catastrophe sociale. Le Président du Centre a perçu le malaise, il en tire les conséquences. Il prouve ainsi, comme l'avait si bien fait son prédécesseur de l'époque Christophe Darbellay, que le statut du Président de la démocratie chrétienne suisse n'implique pas, dans son cahier des charges, la fonction de passe-murailles. On lui en sait gré : la politique exige courage, anticipation et vision.
     
    L'immigration, que cela plaise ou non , est une préoccupation majeure des Suisses. La volonté du peuple et des cantons, le 9 février 2014, a été bafouée. Il faut réguler, réguler, et encore réguler. Je n'ai jamais dit "stopper". J'ai dit "réguler". Et je dirai "réguler", tant que la classe politique n'aura pas pris la mesure du problème, dans les strates profondes, à commencer par les plus défavorisées, de la population suisse.
     
     
    Pascal Décaillet