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Madame se meurt, Madame est morte

 
Sur le vif - Vendredi 16.06.23 - 09.14h
 
 
En bientôt quarante ans de journalisme professionnel, je n'ai connu Lionel Dugerdil que sur le tard, ça doit faire deux ans. Immédiatement, j'ai senti chez cet homme souriant, toujours de bonne humeur, plein d'humour, l'éclosion d'une figure prometteuse pour l'UDC genevoise, dont le problème no 1 a longtemps été le renouvellement du casting.
 
Au fil des débats, j'ai appris à le connaître. Non seulement jovial et plein de bon sens paysan, mais remarquable connaisseur des dossiers. Pas seulement, et de loin, ceux de l'agriculture. Vision très précise et documentée des finances publiques, de la fiscalité, du pouvoir d'achat des classes moyennes : exactement les sujets que moi, dans mes émissions et mes éditos, je mets en avant depuis tant d'années, contre les modes sociétales, qui ont submergé les rédactions.
 
Lionel Dugerdil n'a pas été élu, mais il a fait une fantastique campagne. Chez ses alliés de droite, et jusqu'au Marais, il a conquis estime et respectabilité. Ils savent bien qu'ils lui doivent quelque chose : pour le Marais, l'élection de leur magistrate. Ils n'ont quand même pas eu le culot de lui dire "À charge de revanche !", on sait ce que vaut la parole des politiques. Mais lui, le job, il l'a fait.
 
Une chose est sûre : Lionel Dugerdil est sorti fortifié de cette campagne. Il siège au Grand Conseil, où il tiendra un rôle majeur. Sa parole franche et directe dans les débats, son instinct des besoins et des colères de la classe moyenne, tout cela en fait un homme politique qui monte.
 
Un UDC qui monte, populaire, compétent, visible et audible, et qui transmet sa joie et son amour de la vie : exactement ce qui commence sérieusement à inquiéter une certaine presse, dont les têtes pensantes, à Zurich, ont juré il y a plus de trente ans la perte de ce parti. J'ai vécu tout cela de l'intérieur, comme correspondant au Palais fédéral, c'était la campagne EEE du 6 décembre 1992, la montée fulgurante de Blocher, les premières crispations dans les milieux financiers pro-européens, au bord de la Limmat.
 
Alors, vous pensez, l'affaire du cambrioleur, quelle aubaine ! L'homme qui monte aurait eu l'impardonnable impudence de porter la main sur celui qui avait juste voulu pénétrer chez lui, tout ramasser, et déguerpir avec le pactole, une broutille !
 
Alors, dans cette presse-là, on se rue sur l'occasion : haro sur le fasciste ! Haro sur le violent ! Et on en fait un thème, alors que le vrai sujet, c'est la multiplication des cambriolages à Genève, par des crapules. On thématise Dugerdil, on feuilletonne Dugerdil, on "fait réagir la classe politique" sur Dugerdil, on laisse s'exprimer des drôles qui n'ont ni le crédit de Dugerdil, ni ses compétences professionnelles, ni son tempérament joyeux, ni son humour, ni sa vision remarquable des classes moyennes. Et on rentre se coucher, persuadé d'avoir œuvré pour la Cité. En lui désignant la Bête immonde.
 
Lionel Dugerdil est un homme politique remarquable, par son instinct, sa puissance de travail, sa facilité de contact, son intelligence. Il est donc dangereux pour les ennemis de son parti. C'est juste ça qu'il faut dire. Le reste, c'est du blabla. Des feuilletons nullissimes pour faire mousser le néant. Les ultimes sursauts d'une presse qui se meurt. On se réjouit qu'un Bossuet surgisse du buisson, et nous annonce, tout sonore encore de la funeste nouvelle : "Madame se meurt, Madame est morte".
 
 
Pascal Décaillet

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