Sur le vif - Mardi 12.03.19 - 09.27h
Avant de dire n'importe quoi sur l'Algérie, et de se réjouir benoîtement du départ d'un vieil homme, merci de lire, lire, et lire encore l'Histoire politique de ce pays passionnant, qui nous est si proche.
Bien sûr que Bouteflika, dans l'état où il se trouve, devait partir. Cela n'est pas contestable. Mais de là à traiter cet homme, le dernier grand destin encore vivant de la génération du FLN, comme le dernier des dictateurs, c'est aller un peu vite en besogne.
Il avait verrouillé le pouvoir, bien sûr. Mais merci de considérer son action dans la durée. Avant 1962, et après 1962. Merci de constater de quoi Bouteflika, certes dans la douleur et en établissant son pouvoir personnel, a sauvé l'Algérie après les terribles épreuves des années 90.
Avant de se réjouir en rond, juste parce qu'il s'agit d'un vieil homme malade, en fin de vie, merci de l'étudier, cette vie précisément, dans le contexte d'éternelle incandescence de l'Histoire politique algérienne depuis l'Indépendance. Toutes les racines entremêlées étant d'ailleurs déjà ancrées avant juillet 1962, dans les luttes de clans internes aux partisans de cette dernière.
Il fallait que Bouteflika s'en aille, c'est sûr. Mais la naïveté des commentaires, leur manichéisme, leur refus de voir à quelles errances fatales, pour l'Algérie donc pour nous, ce départ peut laisser le champ libre, tout cela dévoile l'absence cruelle, chez nous, de connaissance en profondeur des contradictions algériennes.
Derrière la candeur des réjouissances, juste parce que l'homme est vieux et impotent, il y a la même ignorance crasse que lorsque nos beaux esprits, il y a quelques années, s'ébahissaient de pâmoison face aux "printemps arabes". On a vu le résultat.
Pascal Décaillet