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Plus européen, tu meurs !

 

Chronique publiée dans le Nouvelliste - Mardi 27.05.14


 
Au moment où vingt-huit de nos Etats voisins viennent d’élire leurs députés au Parlement européen, un mot sur la Suisse. Nous sommes européens, c’est sûr. Jusqu’au tréfonds. Nous le sommes par nos langues, nos religions, notre Histoire, nos institutions, nos systèmes juridiques, notre culture. Par l’hydrographie, étant source de fleuves baignant le continent, par la flore et la faune, en même le minéral. Plus européen que nous, tu meurs.


Européens par l’Histoire : tous les grands mouvements ayant secoué le continent ont, au cœur de la foulée, ébranlé la Suisse : grands ordres chrétiens, humanisme, Réforme, Révolution française, celles de 1848, Kulturkampf. Et même l’Affaire Dreyfus : dans la série radiophonique que j’avais consacrée à cette dernière en 1994, je relevais les traces profondes de «l’Affaire » dans nos cantons romands. L’idée d’une Suisse isolée est au fond récente : l’idéologie du Réduit national, certes salutaire à l’époque, a marqué les consciences.


Ce que beaucoup d’entre nous refusent, ça n’est pas l’Europe. C’est la machinerie technocratique. Pas assez claire. Pas assez lisible. Institutions floues. Prérogatives mal définies. Déficit démocratique évident : la France se prononce en 2005, on l’engueule d’avoir mal voté, on outrepasse sa décision. Toutes choses qui, nous Suisses, attachés à la démocratie directe, nous heurtent viscéralement. Ce côté « usine à gaz », l’Union vient de le payer très cher dimanche soir : de partout, la voix des peuples revient. En France. En Grande Bretagne. Mais pas seulement.


Et nous ? Nous ne sommes ni meilleurs, ni pires que les autres. Mais nous avons des institutions, comme le fédéralisme et la démocratie directe, auxquelles nous tenons comme à la prunelle de nos yeux. Nous entendons aussi demeurer souverains. Ce qui n’exclut ni la discussion avec nos voisins, ni la négociation de traités, pour peu que ces derniers soient librement consentis, et non dictés, pistolet sur la tempe, par quelque Montebourg de passage. A en croire les résultats tombés dans la nuit européenne de dimanche à lundi, nous ne sommes apparemment pas les seuls à éprouver en profondeur cette pulsion de liberté. Bienvenue à l’Europe des peuples. A celle-là, un jour, notre pays dira oui.



Pascal Décaillet

 

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