Chronique publiée dans la Tribune de Genève - Lundi 02.05.11
Bien sûr, Rome est un cirque et ce cirque est maxime. Bien sûr, il y a l’éternité de Cinecitta, la constante mise en scène de cette ville unique, le front audacieux des palais, le grand Du Bellay en avait très vite souffert. Bien sûr, une béatification est un show, une piqûre de rappel, « de propaganda fide », trop de faste, trop de télés, c’est Kate et William version Vatican. Catholique, je préfère la sobriété de Cluny. Ou Cîteaux. Ou la solitude d’une madone, au fond d’une chapelle de montagne. En Entremont.
Mais l’essentiel, hier à Rome, c’était la mémoire de cet homme-là. Dire qu’il m’a marqué est un bien faible mot. Le christianisme, non par les grands mots, mais par l’exemple. Un être seul, mais au cœur du monde, dans l’acuité de sa souffrance. Karol Wojtyla, c’était une solitude et une résistance. Un homme sur le chemin, dont les dernières années furent de croix, comme tant d’entre nous, face à la maladie, parfois l’abandon. Souffrance au cœur des souffrances. Avec elles. Juste Simon de Cyrène, qui aide à porter. C’est tout.
Alors voilà, il est mort il y a six ans, et je resterai simplement fier d’avoir été, quelque part dans la masse du monde, son contemporain. Au-delà de la foi qui est chose privée, et dont je suis d’ailleurs incapable de parler, il y avait la lumière d’un exemple. Le sien. Pas la Lumière blafarde, avec un grand L. Non, juste le lumignon. Auprès de la madone. Celle qui nous sourit.
Pascal Décaillet